« Bonsoir » : Thierry Ardisson, visage impertinent de la télé, est décédé à 76 ans

Thierry Ardisson et son épouse Audrey Crespo-Mara au 65e festival du film de Cannes le 19 mai 2012

« Amis de l’homme en noir, bonsoir! » : adepte des interviews et des formules choc, l’animateur et producteur Thierry Ardisson, figure impertinente et prolifique du paysage audiovisuel français, est décédé lundi à 76 ans.

Star du petit écran dès les années 1980, Thierry Ardisson est mort à Paris des suites d’un cancer du foie, ont annoncé son épouse et ses enfants dans un communiqué à l’AFP.

« Thierry est parti comme il a vécu. En homme courageux et libre. Avec ses enfants et les miens, nous étions unis autour de lui. Jusqu’à son dernier souffle », a écrit sa femme, la journaliste de TF1 Audrey Crespo-Mara.

Toujours tout de noir vêtu – ce qui lui a valu son surnom – et flanqué d’un éternel sourire, Ardisson a bousculé le paysage cathodique avec ses talk-shows à succès où se rendait le Tout-Paris, comme « Bains de minuit », présenté depuis la boîte de nuit des Bains Douches à Paris, « Lunettes noires pour nuits blanches » au mythique Palace et « Rive droite / Rive gauche », premier magazine culturel TV quotidien en France.

« Thierry Ardisson imposa pendant des décennies au paysage audiovisuel français une voix, une silhouette, un style, un esprit, teinté de curiosité et d’irrévérence », a réagi l’Elysée dans un communiqué, saluant un homme qui « contribua à écrire l’histoire de la télévision française ».

« Langage absolument nouveau »

Ses interviews cash, parfois à rebrousse-poil voire intrusives, ont établi sa réputation. L’animateur avait le sens de la formule. Certaines, comme ses « Bonsoirs » ou « Magnéto, Serge! », restent indissociables de son personnage.

« Quand je suis arrivé, il y avait à l’antenne un langage télévisuel prude et compassé. On s’est mis à parler comme dans la vie, de sexe, d’alcool et de drogue », rembobinait l’ancien publicitaire.

« Il avait un langage absolument nouveau pour la télé », a souligné auprès de l’AFP Marie-France Brière, ancienne figure de TF1 qui le lança en 1985, ajoutant que mourir un 14-Juillet était un « pied de nez » pour un royaliste convaincu.

Il a connu ses plus belles heures avec « Tout le monde en parle » sur France 2 (1998-2006) où ses questions, parfois trash, ont souvent créé le buzz.

« Tellement de rires, d’engueulades aussi, parfois de silence mal compris et de rupture… Mais, à la fin, toujours la paix et ton rire reconnaissable entre tous. Ta grande capacité de travail, le soin infini avec lequel tu préparais tes célèbres fiches, tes interviews ont fait ton image à jamais », a réagi dans un texte transmis à l’AFP la productrice Catherine Barma, qui a longtemps travaillé avec lui.

Thierry Ardisson est ensuite passé aux commandes de « Salut les Terriens » (2006-2019), sur Canal+ puis C8, qu’il doit arrêter après avoir refusé d’en baisser le budget.

Jamais à court de concepts, il a aussi présenté « 93, Faubourg Saint-Honoré », dîners éclectiques filmés à son domicile, sur Paris Première et brièvement « Hôtel du temps » sur France 3, où il interrogeait des stars défuntes recréées grâce aux nouvelles technologies.

Né le 6 janvier 1949 à Bourganeuf (Creuse), d’un père ingénieur et d’une mère femme au foyer, Thierry Ardisson, décoré de la Légion d’honneur en 2024, a passé une partie de son enfance en Algérie, puis en internat catholique en Haute-Savoie.

« L’homme en noir », son dernier livre paru en mai, aborde son rapport à sa famille issue d’un milieu social modeste, qu’il a tout fait pour dépasser.

En 2020, c’est la consécration avec « Arditube », chaîne YouTube lancée par l’Institut national de l’audiovisuel (INA) et dédiée au patrimoine télévisuel – 35 émissions – d’un animateur peu connu pour sa modestie.

« Mégalo »

Pour Bernard Pivot, il était « tellement mégalo qu’il croit avoir inventé la vulgarité à la télévision ».

L’écrivaine Christine Angot s’était dite humiliée à plusieurs reprises sur le plateau de « Tout le monde en parle », se souvenant de rires face à l’inceste qu’elle relate dans son oeuvre.

Lors de sa dernière apparition à la télé, en mai dans « Quelle époque! » sur France 2, il avait créé la polémique en comparant Gaza à Auschwitz. Il avait ensuite demandé pardon à « ses amis juifs ».

Marié à trois reprises, Thierry Ardisson a eu trois enfants avec la musicienne Béatrice Loustalan. Il avait épousé en 2014 la journaliste Audrey Crespo-Mara.

Sans en révéler les détails, son entourage a indiqué lundi à l’AFP qu’il avait « laissé des instructions » à ses proches pour ses obsèques.

Il avait également choisi de se dévoiler dans un documentaire réalisé par Audrey Crespo-Mara, « La face cachée de l’homme en noir », diffusé sur TF1 mercredi à 22H50.

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