Le chemin de cet enfant de la balle a été long avant de connaître le succès et de prendre du plaisir dans son métier d’acteur. Mais cela en valait la peine. Ce dimanche à 22h55, Arte diffuse le documentaire «Jeff Bridges, star malgré lui».
Doué pour la musique, la peinture, la sculpture et l’art dramatique, Jeff Bridges a toujours eu l’embarras du choix artistique. C’est hélas l’embarras qui a prévalu durant plusieurs décennies, l’acteur ayant cherché un angle lui permettant d’échapper au moule que son père, comédien lui aussi, avait prévu pour lui…
Obéis et pleure, mon fils !
Née le 4 décembre 1949, la star tombe dans la marmite d’une famille d’acteurs : Lloyd et Dorothy Bridges, ses parents, sont des acteurs connus et appréciés, tout comme son frère aîné, Beau Bridges (« L’Heure du crime », « Susie et les Baker Boys »). Avant la naissance de Jeff, sa mère a perdu un enfant. Le « suppléant » est donc très attendu. Et on lui réserve une carrière toute tracée. Le petit a à peine 1 an lorsqu’il apparaît dans « La Voleuse d’amour », de John Cromwell. Le nourrisson est censé pleurer. On le pince pour servir son « rôle ».
À l’âge adulte, le débutant est vite remarqué dans « La Dernière séance », de Peter Bogdanovich (1971), qui lui vaut déjà une nomination aux Oscars. Mais à 22 ans, il se cherche encore.
Surmonter les angoisses
Malgré la désapprobation paternelle, le cadet gratte la guitare avec talent et monte un groupe avec ses potes, les Wednesday Night Jams. « On commençait nos journées par nous défoncer dans ma vieille Buick en écoutant la radio ! » Après le tournage de « Last American Hero » (Lamont Johnson, 1973), qui le laisse sur les rotules, l’acteur songe à « arrêter de faire semblant ». Mais « The Iceman Cometh » (John Frankenheimer, 1973) l’amène à croiser l’une de ses idoles, Robert Ryan. Jeff, qui a bien du mal à gérer ses frayeurs sur un plateau, apprend que Ryan continue lui aussi à souffrir de l’angoisse de la performance, mais la surmonte pour donner le meilleur de lui-même.
Cette belle leçon le change. Il s’essaie à des registres variés qui laissent une trace dans le monde du 7e art : l’innovant « Tron » (Steven Lisberger, 1982), le thriller romantique « Contre toute attente » (Taylor Hackford, 1984) associé à une BO porteuse (« Take a Look at Me Now », hit de Phil Collins), puis « Starman » (John Carpenter, 1984) où Bridges compose un extraterrestre à la fois désopilant et attachant.
Place à l’émotion
Et ce n’est rien face à ce qui l’attend. À la fin des nineties, l’artiste crève enfin l’écran avec des héros cultes, dont The Dude dans « The Big Lebowski » (1998, réalisé par les frères Cohen), un rôle de sympathique dilettante qui colle à son image à la fois foutraque et cool. Dix ans plus tard, « Crazy Heart » (Scott Cooper, 2009) – l’errance d’une ex-star de country music -, lui offre enfin l’Oscar du Meilleur acteur. Jeff a alors 61 ans. Et s’est enfin trouvé. Quelques années plus tard, il renoue avec la musique, sans abandonner l’écran. « C’est une facette de moi-même », dit-il à the-talk.com. « Le but dans toutes ces activités différentes, c’est de s’effacer et de laisser l’émotion nous traverser ! »
Cet article est paru dans le Télépro du 17/7/2025