Marlon Brando : l’île de la consolation

Marlon Brando exigea, par testament, que Tetiaroa contribue à la préservation de l'environnement et à l'étude de la biodiversité. Son souhait fut respecté.

L’acteur avait tout pour être heureux : talent inimitable, histoires d’amour, nombreux enfants, fortune. Ces cadeaux de la vie ne suffirent pas à calmer son âme tourmentée. Il chercha alors l’apaisement dans un ailleurs paradisiaque.

Vendredi à 20h30, La Trois revient sur le « mirage tahitien » de Brando, un atoll de Polynésie française composé de douze îlots, pour la plupart inhabités, où ce fils d’alcooliques espérait amorcer une autre vie pour panser ses blessures d’enfance. Harcelée par les médias, la star du cinéma, alors au faîte de sa célébrité, voyait dans ce petit paradis l’opportunité de se ressourcer loin de la frénésie de Hollywood. Intéressé par les sciences et sensible à la cause environnementale, il rêvait d’en faire un sanctuaire naturel.

Possédé

« Mon âme est un lieu privé ! », dit l’artiste à Playboy en 1977. Il est alors, depuis onze ans, le propriétaire de Tetiaroa, atoll polynésien situé en plein milieu du Pacifique, à 60 km de Papeete, et acquis pour 200.000 $. Il l’avait découvert durant le tournage des « Révoltés du Bounty » en 1962. La star, qui pratiquait l’autohypnose, confiait alors : « La plupart des gens seraient effrayés par la solitude. Moi, j’aime le vide, le ciel, contempler un hémisphère d’étoiles… La première nuit que j’ai passée à Tetiaroa, j’ai posé ma tête sur une noix de coco enfoncée dans le sable que j’utilisais comme oreiller. Le vent vous caresse comme vous n’avez jamais été caressé de votre vie. J’ai très vite réalisé que je ne possédais pas cette île, c’est l’île qui me possédait. »

Tetiaroa © Gamma-Rapho via Getty Images

Du paradis…

Marlon Brando entreprend des fouilles archéologiques, se met à l’aquaculture, envisage de fonder une école, voire une université de la mer. Pour faire aboutir ses projets, il puise dans sa fortune personnelle. Son hôtel engloutit des sommes folles, pour un succès mitigé : le confort rustique ne correspond pas aux attentes touristiques de l’époque. Et son idée de réunir Polynésiens et scientifiques pour des travaux menés en commun se révèle difficile… Marlon Brando veut pourtant protéger la faune, la flore, lancer un message écologique et ouvrir une école sur l’île.

… à l’enfer

Sur le plan personnel, le destin, hélas, s’en mêle. Le héros d’ « Un tramway nommé désir », qui a eu trois épouses et au moins onze enfants (des sources parlent de quatorze) biologiques et adoptés, voit sa famille se déchirer. En 1990, son fils aîné, Christian, abat le petit ami de sa demi-sœur, Cheyenne (fille de Brando et de Tarita, actrice sino-polynésienne), et est emprisonné. Cinq ans plus tard, Cheyenne se suicide dans la propriété paternelle californienne, désormais surnommée « la maison de la douleur ».

Pour l’éternité…

Brando, critiqué pour son obésité, se désintéresse du 7e art. Il n’accepte plus que des rôles pour l’argent – hormis sa collaboration avec Johnny Depp dans « The Brave ». Lorsqu’il se réfugie sur son île, l’esprit plein de tumultes, celle-ci est à la fois son paradis et son enfer. Après le trépas de l’acteur en 2004 (à 80 ans), ses cendres sont en partie dispersées à Tahiti. Sur du doux sable blanc.

Cet article est paru dans le Télépro du 30/10/2025

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