Un internaute doit indemniser une journaliste et la RTBF pour atteinte à l‘honneur

Florence Hainaut © RTBF

Le tribunal de première instance francophone de Bruxelles, section civile, a condamné J. D. à payer 1.500 euros à la journaliste Florence Hainaut et 1.000 euros à la RTBF, à titre de dommages et intérêts, pour une atteinte fautive à leur honneur et leur réputation.

Dans son jugement prononcé le 20 octobre, mais transmis aux parties demanderesses lundi, le tribunal estime que « le dommage moral subi par la journaliste est certain ».

Il estime que J. D., auteur de nombreuses publications sur le réseau social X, avait l’intention de nuire professionnellement à la journaliste. Le tribunal a estimé que huit comptes sur la plateforme peuvent être reliés à la personne de J. D. Les publications litigieuses effectuées via ces comptes, souvent anonymes, s’inscrivent dans une « stratégie de dénigrement » menée contre la journaliste, détaille le tribunal.

« Une stratégie de dénigrement a été mise au point de manière collective avec systématisme, et ensuite exécutée collectivement, dans l’objectif de nuire notamment à madame Hainaut à qui il est reproché de pratiquer, dans le cadre de ses activités professionnelles, un féminisme de mauvais aloi et par ailleurs de se plaindre, à tort, d’une situation de cyberharcèlement », indique le texte.

Le tribunal souligne que J. D. dénomme « systématiquement et de manière publique » la journaliste de « Crazy Flo », réfère à « la Bande Hainaut » et emploie les termes « journalopes », « oies », « meute » ou « secte ». « Rien de cela n’est anodin », indique le jugement du 20 octobre.

Si les publications de J. D. ne dépassent pas toutes la liberté d’expression, le tribunal de première instance a néanmoins estimé que l’homme a dépassé les limites en publiant un appel public à porter plainte contre la journaliste auprès du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA), le 20 octobre 2022.

Enfin, le tribunal estime que cette faute a également causé un dommage à la RTBF, qui se voit contrainte de soutenir « au-delà de ce qui est raisonnable » les journalistes femmes qui « acceptent de participer loyalement aux missions qui sont les siennes », en référence aux missions de service public de la RTBF qui doit renforcer la prise en compte de l’égalité, de la diversité et des violences faites aux femmes dans son traitement de l’actualité.

« C’est la première fois qu’une décision de justice met cela en avant », se réjouit Me Audrey Adam, l’avocate de Florence Hainaut.

Pour l’avocate, ce jugement est important, car il reconnaît l’existence d’une entreprise visant à dénigrer sa cliente. En déclarant qu’il existe assez d’éléments pour relier les comptes anonymes à un seul auteur (J. D.), le tribunal civil a pu analyser le mécanisme à l’œuvre, plutôt que le contenu de chaque publication. L’addition de chacune des actions de J. D. constitue la faute, conclut Me Audrey Adam.

Prise isolément, chaque publication sur un réseau social relève du délit de presse, qui se traite en justice pénale. Le contenu d’une publication litigieuse devrait dès lors être jugé par une cour d’assises, ce qui n’arrive jamais.

En plus de l’appel public lancé par J. D. à porter plainte contre Florence Hainaut auprès du CSA, le dossier de pièces analysé par le tribunal de première instance comprend de nombreuses publications émanant de comptes anonymes sur le réseau social X reliées à J. D. et remontant parfois jusqu’en 2019.

Le dossier contient aussi 380 pages imprimées reprenant des échanges entre plusieurs membres de deux groupes Facebook fermés, « La Jupiler Ligue du LOL » et « La Bande des Salopards ».

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