La bataille de Little Bighorn : une ruse de Sioux

Un affrontement fondateur de l'identité américaine © Isopix

Elle est entrée dans la légende. Grâce à un tour de passe-passe, le perdant en est sorti vainqueur.

C’est une histoire de cow-boys et d’Indiens, une de ces histoires du Far West qui hantent l’imaginaire américain : la bataille de Little Bighorn. Un jour de juin 1876, les Sioux de Sitting Bull et Crazy Horse ont infligé une cuisante défaite au général Custer… Le perdant est pourtant devenu une véritable légende !

Vous l’avez croisé dans «Lucky Luke» ou «Docteur Quinn, femme médecin», vous l’avez vu au cinéma sous les traits d’Errol Flynn ou Henry Fonda. Après Lincoln, Custer est la personnalité américaine à laquelle le plus de livres ont été consacrés. Samedi 22 février à 20h50, Arte raconte le récit de Little Bighorn. Plus qu’une simple bataille, c’est l’un des moments fondateurs de l’identité américaine.

Des terres sacrées

Tout commence après la guerre de Sécession, en 1865. L’armée américaine se déplace vers l’Ouest pour conquérir les terres occupées par les Indiens. À la tête du 7e régiment de cavalerie, le général Custer n’est pas un inconnu. Il fut l’un des héros de la guerre civile et il est bien décidé à s’offrir quelques victoires dans les guerres indiennes.

En 1868, il remporte la bataille de la Washita contre les Cheyennes. Il se targue d’avoir tué une centaine de guerriers, bien que la plupart des victimes soient plutôt des femmes et des enfants… Les Américains se battent pour des territoires, mais aussi pour le progrès économique. En 1873, Custer est envoyé dans le Dakota pour protéger le tracé d’une future ligne de chemin de fer. Il est ensuite chargé d’explorer l’éventuelle présence de gisements d’or…

Mais le Dakota est le fief des Sioux Lakotas, implantés là depuis des millénaires. Ils sont particulièrement attachés aux Black Hills, des montagnes qu’ils considèrent comme sacrées. En 1868, le gouvernement américain s’était engagé à laisser les Black Hills aux Sioux par le traité de Fort Laramie. Mais lorsque de l’or est découvert dans la région, le traité vole en éclats.

L’histoire réécrite

En 1876, l’armée impose aux Indiens de rejoindre les réserves créées pour eux par l’État. Ceux qui refusent sont considérés comme ennemis des États-Unis. Sitting Bull est l’un d’eux. Il a coalisé quelques milliers de Sioux et de Cheyennes déterminés à résister. Leur campement est installé près de la rivière Little Bighorn.

Le 25 juin 1876, Custer divise ses six cents hommes en trois colonnes pour encercler le camp. Il n’a pas mesuré que les Indiens sont dix fois plus nombreux… Au terme de la bataille, il n’y a pas un seul survivant dans la colonne de Custer. C’est un terrible échec pour l’armée américaine. Et il tombe au plus mauvais moment : à quelques jours de ce 4 juillet 1876 où tout le pays doit célébrer le centenaire de l’Indépendance. Une défaite contre les Indiens est inconcevable.

L’histoire de Little Bighorn est donc rapidement réécrite pour l’opinion publique, faisant du général Custer un héros mort pour la patrie. On lui consacre des articles de presse, des romans populaires, des shows de cabaret. Les 150.000 saloons du pays affichent le poster offert par la bière Budweiser qui représente la bataille : Custer au centre, affrontant vaillamment l’ennemi. Voilà comment on construit l’histoire d’un pays…

Cet article est paru dans le magazine Télépro du 20/2/2020

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