
«Indignez-vous !», écrivait Stéphane Hessel il y a treize ans déjà, s’érigeant, un peu à sa surprise, en porte-parole de toute une jeune génération que les inégalités du monde écoeuraient.
Aujourd’hui, le message de l’ancien résistant pourrait sembler galvaudé, tant on s’indigne à tort et à travers. Bien sûr, les raisons de se révolter pullulent. Mais à l’heure ou l’instantanéité offerte par la connexion permanente aux réseaux sociaux débouche sur des réactions immédiates, une indignation chasse l’autre, immédiatement oubliée. Ou au contraire, montée en épingle pour susciter autant de contre-indignations...
Avec, comme corollaire, la primauté de l’émotion sur la raison, au mépris souvent d’une vérité qui se retrouve bien malmenée, quand elle n’est pas simplement niée. En ligne, le recul nécessaire au traitement de l’info n’existe pas, ou si peu, et les nouvelles brutes, forcément dramatiques, se succèdent à un rythme fou. Ce qui participe à ce mouvement continu de choœurs horrifiés, noyant protestations sincères et revendications légitimes dans un brouhaha inaudible.
Il est temps de s’en indigner !
Julien Bruyère,
Rédacteur en chef adjoint