
Le relevé du temps de parole des candidats à l'élection présidentielle française serait-il une fausse bonne idée ?
En France (comme chez nous), l’Arcom (ex-CSA) fait un relevé du temps de parole de chaque candidat à l’élection présidentielle, et s’assure que tout le monde a le même temps d’antenne lors d’un débat ou de programmes liés de près ou de loin à la politique. En bout de course (à la fin de la campagne), chacun doit avoir eu le même temps de parole pour répandre son programme, sur chaque chaîne. «Logique !», me direz-vous. Pas si sûr… La démocratie devient une contrainte.
Ce mercredi, on apprend que Canal+ (France) déprogramme sa série «Au tableau !» (même concept que l’émission d’Ophélie Fontana, en 2016, où des personnalités rencontraient les enfants d’une classe, sur La Deux) avec des candidats à la présidentielle cuisinés par des écoliers. En cause ? Le refus de Jean-Luc Mélenchon, d’Emmanuel Macron et de Marie Le Pen de s’y plier, mots d'excuses à l'appui.
Des absences contraignant la chaîne cryptée à devoir modifier sa programmation. En effet, elle n'est pas en mesure de rassembler la totalité des candidats en tête des sondages et donc de répondre aux contraintes de respect d’équité des temps de parole imposées par l’Arcom… Une bonne nouvelle ? Sûrement pas. Un candidat en vue peut faire échouer un débat ou une rencontre télévisée en refusant purement et simplement d’y aller, et ainsi pénaliser les autres. Niveau démocratie, on a vu mieux, non ?
Ce règlement drastique sur le temps de parole n’est d’ailleurs imposé que pour la télévision et la radio, pas le Web. L’émission spéciale politique prévue sur Canal+, le 22 mars, se retrouvera donc sur le site de la chaîne. Le Web, qui est justement le média dont raffolent les jeunes pour s’informer, mais sans aucune contrainte ou presque… Alors que c’est une tranche de la population qui est appelée à découvrir la démocratie et faire son «devoir» de citoyen. Un coup dans l’eau.
Avec l’émergence des nouvelles consommations médias, ne serait-il pas temps de revoir des règles dépassées ? Un candidat qui refuse de prendre part au débat perd l’occasion de donner sa voix, il ne peut pas couper le son à tous les autres…
Pierre Bertinchamps
Journaliste