
La parole est d'argent, mais le silence est d'or, comme dit le proverbe. Un adage que les scénaristes de fictions françaises n'ont pas encore bien compris...
Des thèmes plus actuels qu'à l'époque de «Julie Lescaut», des scénarios plus réalistes, des décors mieux soignés... Que ce soit côté séries ou au rayon téléfilms, les productions françaises ont fait de jolis progrès ces dernières années en termes de qualité. Des succès tels que «HPI» (TF1), «Dix pour cent» (France 2), «Alex Hugo» (France 3) ou «En thérapie» (Arte) n'ont plus grand-chose à envier à la concurrence venue d'outre-Atlantique.
Si j'écris «plus grand-chose», c'est qu'il reste en effet une marge de différence pour les rendre totalement crédibles. Notamment au niveau des dialogues.
Dans la plupart des cas, en France, vous pouvez être sûr(e) qu'un plan = une réplique. Les acteurs à l'écran ont toujours quelque chose à dire ! Mais est-ce vraiment utile à chaque fois ? Est-ce que ça apporte un plus à l'intrigue ? A-t-on besoin de souligner par des mots une situation déjà bien posée un peu plus tôt par les images ou la musique ? Faut-il en remettre une couche systématiquement, pour que chaque comédien ait son temps de parole «syndical» ?
Je regardais encore «La Doc et le véto» (France 3) cette semaine, ainsi que le début de la saison 2 de «La Faute à Rousseau» (sur France 2, avec notre trop rare compatriote Charlie Dupont dans le rôle principal !) : c'est bien ficelé, les acteurs jouent bien, mais ils parlent bien trop par rapport à leurs confrères américains. Dans la vraie vie, vous ne verrez jamais de telles situations. On ne verbalise pas tout !
À l'inverse, prenez le contre-pied ultime américain, avec «La Servante écarlate», dont la saison 3 est actuellement à découvrir chaque mardi à 20 h 35 sur La Trois, et qui est sans conteste l'une des meilleures séries de ces dernières années. L'histoire s'y prête évidemment, mais les échanges entre personnages sont soigneusement réduits au strict nécessaire. Tout est dans les non-dits, le véritable jeu d'acteur, les gestes, les atmosphères. D'ailleurs, l'actrice principale, Elisabeth Moss, a développé tout un éventail de mimiques pour faire passer une incroyable palette d'émotions aux téléspectateurs. Et paradoxalement, cela renforce... les dialogues !
«Quelle musique, le silence !» disait le dramaturge Jean Anouilh, qui était pourtant Français.
Allez, à mon tour de la fermer, en vous souhaitant un excellent week-end !
Julien Vandevenne
Rédacteur en chef adjoint