
Dérisoire le fait d'empêcher les délégations russes de participer à l'Eurovision ou à une compétition sportive ? Pas tant que ça...
Quand les troupes de Moscou ont envahi l'Ukraine fin février, les organisateurs de l'Eurovision n'ont pas mis vingt-quatre heures pour exclure la Russie du concours. Une annonce qui a fait sourire (jaune) de nombreux observateurs, qui ne voyaient pas vraiment le rapport entre la grand-messe annuelle du kitsch et l'horreur sur le terrain. «Quelle belle jambe ça lui fait, à Poutine !», commentait-on un peu partout.
Mais par la suite, plusieurs décisions du même acabit sont tombées : finale de la Champions League déplacée de Saint-Pétersbourg à Paris, participation compromise au prochain Mondial de foot pour l'équipe russe, course (Sotchi) et retransmissions de F1 annulées...
Certains internautes se sont également offusqués que nous relayions ces infos qu'ils jugeaient indécentes, alors que des civils payaient de leur vie, à Kiev où dans d'autres villes ukrainiennes. Comme si nous n'avions pas conscience de la tragédie en cours...
C'est oublier la portée symbolique que revêt ce genre de cérémonies pour les régimes forts. Les dictateurs et autocrates de tous bords utilisent ces événements comme des vitrines, arborent leur meilleur visage devant les caméras du monde entier, alors que derrière la façade, la réalité est tout autre. Souvenez-vous des Jeux olympiques de Berlin de 1936 organisés par les nazis. Et regardez encore tous les imbroglios diplomatiques («j'y vais, j'y vais pas...») suscités par les derniers JO de Pékin...
Et pour en revenir à l'Eurovision, rappelons que le show rencontre un succès considérable à l'est du continent, où le jeu est pris bien plus au sérieux que chez nous. Laisser les Russes parader sur la scène de Turin en mai, comme si de rien n'était, c'est plutôt ça qui aurait été indécent.
Julien Vandevenne
Rédacteur en chef adjoint