Tout semble opposer Alfred Nobel et Bertha von Suttner. Pourtant, leurs vingt ans d’amitié et leur fol espoir d’un monde durablement en paix aboutiront à la création du prix le plus célèbre au monde. Ce samedi à 20h35, La Trois diffuse le documentaire « Alfred Nobel et Bertha von Suttner : le prix de la paix ».
Né le 21 octobre 1833 à Stockholm, Alfred Nobel est issu d’une longue lignée d’ingénieurs. À 18 ans, il part aux États-Unis et en Europe pour étudier la chimie. De retour chez lui, il concentre ses recherches sur les explosifs. Dont la nitroglycérine, très instable, qui a causé plusieurs explosions dans l’usine familiale, coûtant la vie à son plus jeune frère. Alfred découvre que, mélangé à du kieselguhr (une roche absorbante), cet explosif est plus sûr à manipuler et nécessite l’utilisation d’un détonateur. Il vient d’inventer la dynamite, brevetée le 7 mai 1867. Conçue avec l’objectif de réaliser des travaux de grande ampleur dans une Europe éprise de modernité, elle sera aussi synonyme de mort.
Bertha
Installé à Paris, Alfred fait paraître, en 1876, une annonce pour trouver une secrétaire. Une certaine Bertha se présente à lui. Née comtesse Kinský von Wchinitz und Tettau le 9 juin 1843 à Prague, elle est versée aux langues, à la musique et férue de voyages. Indépendante, élevée par une mère qui dilapide sa fortune de veuve aux jeux et toujours célibataire à 30 ans, elle entre comme gouvernante au service de la famille von Suttner pour subvenir à ses besoins. Et tombe amoureuse d’Arthur, le fils de la maison, de sept ans son cadet. C’est à ce moment que, quelques semaines durant, elle est employée par Alfred Nobel. Bertha rentrera ensuite à Vienne et épousera Arthur en secret. Si la collaboration entre Alfred et Bertha ne dure pas, leur correspondance ne cessera qu’avec le décès d’Alfred.
Pacifisme
Leurs échanges épistolaires tournent autour d’un sujet qui va animer Bertha toute sa vie : le pacifisme. Avec son mari, elle s’engage dans une carrière d’écriture et de journalisme. Marquée par les affrontements sanglants de la guerre russo-turque de 1877-78, elle participe à la création d’organismes de lutte pour la paix, s’entretient avec les hommes puissants de son temps pour les convaincre du bien-fondé du désarmement, prend la parole lors de congrès mondiaux et met sa plume au service de sa cause. Sa notoriété explose avec la publication de « Bas les armes ! » (1889), roman dépeignant les horreurs de la guerre et traduit dans une quinzaine de langues.
Nobel
Alfred Nobel adhère à sa cause. Peut-être était-il aussi pétri de regrets par l’utilisation qui était faite de son invention ? Toujours est-il qu’il change son testament et lègue la quasi-totalité de sa fortune (soit, aujourd’hui, l’équivalent d’environ 200 millions d’euros) à la création d’un fonds qui, chaque année, devra récompenser « ceux qui ont apporté le plus grand bénéfice à l’humanité » dans cinq domaines : la physique, la chimie, la médecine, la littérature et… la paix. Alfred meurt l’année suivante, le 10 décembre 1896. Les premiers prix sont remis pour la première fois à cette même date, en 1901. Bertha obtient le prix Nobel de la paix en 1905.
Paix norvégienne
338 nominations pour le prix Nobel de la Paix ont été recensées cette année. Le gagnant sera annoncé le 10 octobre. Si tous les vainqueurs reçoivent leur prix le 10 décembre, seul celui de la Paix est remis en Norvège, quand tous les autres sont décernés en Suède. À l’époque où Nobel rédige son testament, les deux pays appartenaient aux royaumes unis de Suède et de Norvège, mais on ignore la raison du souhait d’Alfred Nobel.
Cet article est paru dans le Télépro du 25/9/2025