Histoire : Charlemagne, un sacré empereur !

Charlemagne (Carolus Magnusen latin), surnommé l’empereur à la barbe fleurie, portait en fait… une moustache ! © Getty Images
Stéphanie Breuer Journaliste

Le jour de Noël de l’an 800, le roi des Francs et des Lombards est couronné empereur à Rome par le pape Léon III.

25 décembre 800. La date, l’une des plus célèbres de l’Histoire, est dans la mémoire de tous les écoliers. Ce jour-là, Charlemagne (724-814), qui a eu « cette idée folle un jour d’inventer l’école », est couronné empereur des Romains par le Pape. Raconté ce dimanche à 13h par Patrick Boucheron sur Arte dans «Quand l’Histoire fait dates», cet événement retentissant marque la création de l’empire carolingien et la renaissance de l’Empire romain.

Fils de Pépin le Bref (qui a succédé aux Mérovingiens en 751), Charles le Grand – il mesurait près de1m90 – devient l’unique représentant de la dynastie carolingienne après la mort de son père en 768 et celle, prématurée, de son frère Carloman trois ans plus tard. À la tête d’un royaume franc unifié, il se lance dans de sanglantes conquêtes et passe une trentaine d’années à guerroyer. Il règne sur un immense territoire, couvrant une bonne partie de l’Europe occidentale, qu’il s’attache à sécuriser aux frontières et à unifier religieusement et politiquement.

Protecteur du Saint-Siège

Comme son père avant lui, Charlemagne, par conviction et par intérêt politique, s’érige en protecteur du Saint-Siège. C’est d’ailleurs pour protéger le Pape des attaques lombardes qu’il conquiert la Lombardie en 774. Plus tard, en 799, Charlemagne accueille dans sa résidence de Paderborn (en Allemagne) le pape Léon III, méprisé par l’aristocratie romaine pour ses origines modestes et menacé par une révolution de palais.

De ce rapprochement va naître l’idée du couronnement de ce roi franc, qui apparaît comme un nouveau Constantin, l’empereur chrétien par excellence. D’autant qu’à cette époque, la régence de l’Empire romain d’Orient est exercée, à Constantinople, par une femme, Irène, qui a crevé les yeux de son fils. « Pour la première fois depuis les origines de l’Empire romain, il n’y a plus, ni en Occident, ni en Orient, d’empereur digne de ce nom », écrit Stéphane Lebecq dans « Le Jour où Charlemagne fut couronné empereur » (L’Histoire). « D’une certaine manière, l’Empire est à prendre. »

Une cérémonie au goût amer

La cérémonie se déroule dans la basilique Saint-Pierre le jour de Noël. Charlemagne entre dans l’église, s’agenouille, baisse la tête devant le tombeau de Saint-Pierre et le Pape dépose la couronne sur sa tête. Ce geste déclenche l’acclamation de la foule. La chronologie du rituel (inversée par rapport à celui de Constantinople où l’acclamation précède le couronnement) fera dire à Charlemagne, d’après le chroniqueur Éginhard : « Si j’avais su ce qui se préparait là, je ne serais jamais entré dans l’église ! » Et pour cause, le roi franc garde un goût amer de cette cérémonie car laisser Léon III lui poser la couronne revient à admettre qu’il doit son pouvoir et sa légitimité d’empereur à l’Église.

Quoi qu’il en soit, l’événement n’est pas anodin, car, à Rome, plus aucun empereur n’avait été sacré depuis 476, année de la chute de l’Empire romain d’Occident. Pour autant, l’unité de cet empire carolingien ne survivra pas longtemps à Charlemagne. Après sa mort en 814, les querelles de ses héritiers aboutissent à sa dislocation. Et le Saint-Empire romain germanique, fondé en 962, ne sera jamais, comme conclut Stéphane Lebecq, « qu’un pâle reflet de l’empire de Charlemagne. C’est pourquoi c’est celui-ci, et lui seul, qui dans la mémoire collective fait figure de précurseur de l’unité européenne. » 

Cet article est paru dans le Télépro du 2/10/2025

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