Le jour où la Chine est née

Complexe funéraire classé parmi les plus grands du monde, le mausolée de Qin Shi Huangdi abrite une armée en terre cuite de milliers de soldats grandeur nature, de centaines de chevaux, de chars… © Getty Images
Stéphanie Breuer Journaliste

En -221, le roi du pays de Qin unifie toute la région. La tradition a fait de ce premier Empereur le fondateur d’un système politique deux fois millénaire.

Plus de 2.000 ans ! C’est le temps qu’aura duré la Chine impériale, malgré les changements de dynasties. De sa fondation en -221 à sa chute en 1912, marquée par l’abdication du dernier empereur et la proclamation de la République de Chine par Sun Yat-sen. Sur Arte (dimanche, 13.00) dans «Quand l’Histoire fait dates», l’historien Patrick Boucheron revient sur cette année 0 de l’Empire du Milieu.

Au IIIe siècle avant notre ère, la Chine est dans la période dite des « Royaumes combattants ». Dans cette mosaïque d’États indépendants, le royaume de Qin, bénéficiant d’une situation privilégiée en Chine du Nord, va tirer son épingle du jeu grâce à sa redoutable armée. Depuis -247, cet État autoritaire et centralisé est dirigé par le prince Zhen Ying, monté sur le trône à 13 ans. Durant neuf ans (à partir de -230), celui-ci mène d’âpres combats pour soumettre l’un après l’autre les six royaumes féodaux composant la Chine d’alors.

Premier Auguste

Ainsi, en -221, Zhen Ying parvient à unifier tout le pays, qui prend alors, pour l’Occident, le nom par lequel il est toujours connu aujourd’hui, et fonde ce que ses habitants nomment l’Empire du Milieu. Afin de marquer sa supériorité sur les rois (« wang ») des périodes précédentes, il se donne le titre de Shi Huangdi, signifiant « Premier Auguste ».

Qin Shi Huangdi © Pictures From History/Universal Images Group via Getty Images

Surnommé le « César chinois », il fait table rase du passé en supprimant le système féodal, remplacé par un gouvernement central fort. Il codifie des lois et unifie l’administration, de même que la monnaie, les systèmes de mesure et surtout l’écriture. Despote éclairé, le premier empereur se fait construire une capitale, Xianyang, et lance de gigantesques travaux sur tout le territoire, dont un réseau de routes et de canalisations et, contre les envahisseurs du Nord, la première Grande Muraille – celle que l’on visite aujourd’hui date du XVe siècle et suit le même tracé.

En quête d’immortalité

« Préoccupé par la quête de l’immortalité, Zheng Ying consulte mages et médecins », raconte Fabienne Manière sur Herodote.net. « Il envoie même une puissante expédition navale à la recherche d’un légendaire pays de l’immortalité (le Japon ?). On n’aura jamais de nouvelles des milliers de personnes engagées dans l’expédition. » Dans la vallée du fleuve Jaune, Qin Shi Huangdi fait construire son futur tombeau, une œuvre colossale censée être protégée par l’incroyable armée de terre cuite, découverte en 1974.

Après sa mort en -210 à l’âge de 49 ans, « la dynastie impériale dont il est le souverain fondateur, censée durer l’éternité, ne lui survit pas », écrit Damien Chaussende dans « Pourquoi l’Empire a duré 2.000 ans » (L’Histoire). « D’une part, la dureté du système législatif et la lourdeur des corvées provoquent une forte hostilité à l’égard du régime au sein du peuple. D’autre part, la mise au pas idéologique promue et appliquée par le Premier ministre Li Si, qui culmine en 213 av. J.-C. par un autodafé de tous les livres non agréés par le pouvoir et, l’année suivante, par l’exécution de 400 lettrés suspectés d’activité séditieuse, suscite l’opposition de l’élite instruite. » Le fils de Qin Shi Huangdi, intronisé « second empereur », est assassiné en -207. Cinq ans plus tard, Liu Bang, contre toute attente, perpétue l’Empire et inaugure la fameuse dynastie des Han, qui fera rayonner la Chine avec les routes de la soie…

Cet article est paru dans le Télépro du 23/10/2025

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