Musique : la résurrection des «Quatre saisons»

Antonio Vivaldi (1678-1741) a bien failli sombrer dans l’oubli ! © Getty Images

Qui n’a jamais entendu « Les Quatre saisons » de Vivaldi ? Avant les années 1950,ce classique des classiques était pourtant totalement inconnu…

De tout le répertoire classique, c’est sans doute l’œuvre la plus connue du grand public : « Les Quatre saisons » de Vivaldi. Ce chef-d’œuvre de la musique baroque fête cette année son 300e anniversaire. Pour l’occasion, Arte lui consacre une soirée spéciale samedi, jour de l’été. Il s’en est pourtant fallu de peu que « Les Quatre saisons » tombent dans l’oubli… Avant les années 1950, pratiquement personne ne connaissait cet hymne musical à la nature.

Gloire et disgrâce

1725. Antonio Vivaldi est au sommet de sa gloire quand il publie la partition de sa dernière composition : « Les Quatre saisons ». De Florence à Vienne, de Rome à Prague, le compositeur vénitien est appelé à se produire aux quatre coins de l’Europe. Il joue pour le Pape, le roi du Danemark et l’empereur du Saint-Empire germanique. Mais rien ne dure… Le compositeur finit par tomber en disgrâce et sa musique avec lui. Quand Vivaldi meurt en 1741, il est oublié et ruiné. Il ne laisse à ses héritiers qu’une tonne de partitions, qui vont passer de grenier en grenier. Jusqu’au début du XXsiècle…

Un célèbre inconnu

En 1922, un collège salésien du Piémont hérite de boîtes remplies de manuscrits anciens dont il ne sait que faire. Parmi eux, des volumes de partitions. Les pères se disent qu’ils pourraient peut-être en tirer un peu d’argent pour rénover leurs bâtiments. Mais ils ne veulent pas se faire rouler. Avant de proposer les documents à un antiquaire, ils les soumettent pour estimation à l’université de Turin. C’est ainsi qu’en 1926, les partitions poussiéreuses atterrissent sur le bureau du professeur d’histoire de la musique, Alberto Gentili. Le musicologue comprend vite qu’il a affaire à l’œuvre d’un musicien vénitien jadis très apprécié : Antonio Vivaldi. Il faut préserver ces documents ! Mais ni l’université ni l’État ne sont prêts à sortir la moindre lire pour ces partitions oubliées d’un musicien inconnu. D’autant que les bons pères en espèrent une somme folle.

Les pages manquantes

Gentili tient bon et finit par trouver un mécène pour financer l’achat des partitions. En les analysant de manière approfondie, il comprend qu’il en manque une partie. Le prof se lance alors dans une véritable enquête pour retrouver et acquérir les pages manquantes. En 1930, Gentili a réussi son pari : il a sauvé et réuni 319 œuvres de Vivaldi. Parmi elles, quatre attirent tout particulièrement son attention : les quatre premiers d’une suite de douze concertos pour violon intitulée « Il cimento dell’armonia e dell’invenzione ». Ce sont « Le Quattro stagioni » – « Les Quatre saisons ». En septembre 1939, une semaine Vivaldi est programmée à Sienne pour célébrer le début de la publication du catalogue complet du compositeur. Mais la Seconde Guerre mondiale vient stopper net la redécouverte de l’œuvre.

De Karajan à Spotify

Il faut attendre 1947 à New York et 1951 à Londres pour que le public entende jouer « Les Quatre saisons » pour la première fois. L’engouement est immédiat et ne s’est jamais arrêté depuis. D’Herbert von Karajan à André Rieu, il en existe désormais plus de mille enregistrements différents. Sortie en 1989, la version de Nigel Kennedy, l’enfant terrible du violon britannique, reste le disque classique le plus vendu de tous les temps. Aujourd’hui, c’est en streaming sur Spotify que « Les Quatre saisons » de Vivaldi continuent de cartonner.

Cet article est paru dans le Télépro du 19/6/2025

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