En août 1989, les États baltes organisent une opposition sans précédent à l’URSS en formant une chaîne humaine de 675 km. L’une des plus ambitieuses mobilisations pacifiques de l’Histoire !
Remontons d’abord plus haut dans le temps. Le 23 août 1939, juste avant le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, l’Allemagne nazie et l’Union soviétique signent un traité de non-agression : le pacte germano-soviétique. L’objectif officiel est d’éviter toute agression entre les deux pays durant dix ans. Mais un protocole secret divise l’Europe de l’Est en zones d’influence, permettant l’invasion et l’annexion de territoires comme la Pologne, les États baltes et la Finlande. Le contenu de cet accord secret sera rendu public bien plus tard, en 1988.
Invasion de la Pologne
Le pacte germano-soviétique ouvre la voie à l’invasion de la Pologne par l’Allemagne le 1er septembre 1939. Les pays baltes – qui désignent trois États sur la rive orientale de la mer Baltique : l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie – sont attribués à la sphère soviétique. En juin 1940, l’URSS envahit ces trois pays qui seront annexés à l’Union soviétique comme républiques socialistes. Cette annexion n’a jamais été reconnue par les États-Unis ni par la plupart des pays occidentaux, qui la considéraient comme illégale. Les peuples baltes résistent à l’URSS, qui répond par des déportations massives et des exécutions publiques.
Révolution chantante
À la fin des années 1980, la révolte gronde et le désir de liberté s’exprime de plus en plus ouvertement en Estonie, Lettonie et Lituanie. Des Fronts populaires se forment dans ces trois pays. L’été 1989, un grand festival de musique à Tallinn, en Estonie, réunit des centaines de milliers de personnes : celles-ci entonnent des mélodies traditionnelles interdites par le régime, dont les paroles sont devenues des symboles de résistance contre l’oppression de Moscou. C’est le début de la « révolution chantante ». Les trois pays baltes décident de lutter ensemble pour se libérer du joug soviétique.
Chaîne humaine
Une idée jaillit : former une chaîne humaine le long de la Via Baltica, une route qui traverse les trois pays baltes du nord au sud. Petit à petit, le projet prend forme. Il donnera naissance à une opération de grande envergure qui restera dans toutes les mémoires : 2 millions de Lituaniens, de Lettons et d’Estoniens sont invités à se donner la main pour former une chaîne humaine longue de 675 km reliant Vilnius, Riga et Tallinn. L’objectif est de sensibiliser l’opinion publique mondiale à la situation des pays baltes sans s’attirer les foudres de Moscou. Un vrai numéro d’équilibriste… La date choisie est symbolique : le 23 août 1989, cinquante ans après la signature du pacte germano-soviétique.
La voie balte
Ce fut l’une des mobilisations pacifiques les plus ambitieuses de l’Histoire, connue sous le nom de « la voie balte », qui a réuni plus d’un quart de la population balte de l’époque. L’impressionnante chaîne humaine, associée à la pression internationale grandissante, donne une impulsion décisive au rétablissement de l’indépendance nationale de l’Estonie, de la Lettonie et de la Lituanie, encourageant dans le même temps les mouvements démocratiques dans toute l’Union soviétique.
En 1991, les trois pays baltes proclameront officiellement leur indépendance, reconnue par l’Union soviétique. Mais depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie en 2022 et les ambitions impérialistes de Vladimir Poutine, les pays baltes demeurent plus que jamais vigilants face aux menaces pesant sur leur souveraineté…
Cet article est paru dans le Télépro du 31/07/2025.