Soufflons le froid… et le froid

Ces dernières années, de nombreux centres de cryothérapie ont fleuri à destination de quidams en quête d’une perte de poids. Pourtant sans garantie de résultats… © Getty Images
Alice Kriescher Journaliste

En pleine période estivale, Arte compte bien nous rafraîchir l’esprit en suivant une nageuse, adepte des eaux glacées finlandaises, afin de comprendre les bienfaits et les risques de l’exposition au froid.

Longtemps réservée aux sportifs de haut niveau, la cryothérapie, soit le traitement par le froid, s’est largement démocratisée, ces dernières années, pour devenir accessible au grand public. Dans quel but ? Explications.

Vieux comme les robes d’Aristote

Loin d’être un procédé nouveau, l’art de soigner son corps en usant du froid comme remède remonte au moins aussi loin que la Grèce antique. Plusieurs écrits, exhumés lors de fouilles archéologiques, font mention de recours à des bains agrémentés de glace naturelle pour traiter des blessures aiguës et citent différents personnages friands de la méthode, des philosophes Hippocrate et Aristote au médecin Claude Galien. C’est évidemment plus tard, en 1978, que la première chambre de cryothérapie voit le jour. Élaborée par un médecin japonais, le Dr Toshima Yamaguchi, elle prend alors la forme d’un caisson où la température peut descendre jusqu’à -164 °C grâce à l’injection d’air azoté. L’année suivante, le spécialiste présente son concept au Congrès européen des rhumatologues. Les praticiens, conquis, adoptent la technique pour des patients atteints d’affections rhumatismales, de douleurs post-traumatiques et, surtout, la machine glacée devient une solution révolutionnaire pour soulager de grands sportifs blessés.

Anti-inflammatoire

Aujourd’hui, le froid reste un allié des sportifs et des médecins qui l’utilisent volontiers comme adjuvant à la kinésithérapie et la physiothérapie. « On en utilise pas mal en kiné sous forme d’un appareil qui souffle de l’air froid sur la zone blessée », nous explique Maëlle Tyberghein, docteure en médecine physique et réadaptation. « Il agit comme un anti-inflammatoire en créant une vasoconstriction, une fermeture des vaisseaux sanguins, diminuant l’apport en sang et donc l’inflammation. »

Argument de poids

Néanmoins, ces dernières années, de nombreux centres de cryothérapie ont fleuri à destination de quidams en quête d’une promesse miracle classique : celle de maigrir. Comment ? Grâce à la cryolipolyse, un traitement localisé au moyen de ventouses diffusant une température allant de 5 à – 10 °C, supposée détruire les cellules graisseuses. Sans surprise, malgré une facture finale se situant entre 150 et 400 €, le résultat est loin d’être garanti. « Pour réduire la masse grasse dans notre corps, la seule chose qui fonctionne, c’est de brûler plus de calories que ce qu’on en absorbe ! », indique Marie Hechtermans, médecin du sport, à la RTBF.

Ne joue pas avec le froid !

Cette utilisation, plus gadget que médicale, de la cryothérapie n’est cependant pas sans risque. En avril dernier, une employée d’une salle de sport parisienne est décédée à la suite d’une fuite d’azote dans un caisson, la cliente qui s’apprêtait à profiter de sa séance a, elle, été grièvement blessée. De quoi poser des questions quant à l’encadrement de cette pratique, d’autant plus que de nombreuses contre-indications existent pour les personnes souffrant d’hypertension, de maladies rénales ou porteuses d’un pacemaker, notamment.

Chez nous, la loi est très claire à ce sujet : selon le SPF Santé publique, « l’encadrement médical est requis dès que la cryothérapie dépasse le simple bien-être et entre dans le domaine thérapeutique ou esthétique à effet physiologique ». Il en va de même pour la cryolipolyse, qui « relève de la médecine esthétique non chirurgicale pour laquelle sont habilités uniquement des titulaires du titre professionnel particulier de médecin. » Une fermeté malheureusement moins concrète sur le terrain. Nombreux sont les centres qui ne remplissent pas ces critères, mais peu de contrôles sont en réalité effectués, sauf en cas de signalement d’un client mécontent.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici