Touaregs : les hommes bleus du désert

Depuis des millénaires, les Touaregs exercent l’un des plus vieux métiers du monde et aussi l’un des plus universels, celui de berger © Getty Images
Stéphanie Breuer Journaliste

Depuis des millénaires, les Touaregs sillonnent l’immensité aride du Sahara avec leurs troupeaux de chèvres et de camélidés. Ce dimanche à 20h10 sur La Une, «Un monde à part» nous emmène à leur rencontre.

Des dunes de sable jaune à perte de vue et des silhouettes bleues de bergers nomades. « Dans notre imaginaire, Sahara et Touaregs fonctionnent en couple », explique Paul Pandolfi dans « Les Touaregs : enquête sur un peuple mythique » (L’Histoire). « Quand nous pensons à cette contrée, c’est l’image, stéréotypée, des Touaregs qui est prégnante. Comme la dune de sable, ils sont devenus une véritable métonymie du désert. »

Il faut dire que ce peuple ancestral, dont le nom a été donné par les Arabes, s’est parfaitement adapté à son environnement. Il descend des populations berbères préhistoriques qui vivaient dans un Sahara verdoyant vers 7.000 ans avant notre ère. De nombreuses traces archéologiques attestent de leur présence au cours de l’Antiquité. C’est au Moyen Âge que ces bergers, qui se définissent comme des hommes libres, adoptent le nomadisme comme mode de vie.

Experts en étoiles

« Pour les Touaregs, leur pays n’est pas un désert vide au sens où l’entendent les étrangers, mais une terre aux espaces nourriciers à condition d’en gérer avec rigueur les rares ressources qui permettent d’y vivre », selon Hélène Claudot-Hawad dans « Les Veilleurs du désert » (L’Histoire). « À côté de l’élevage, de l’agriculture oasienne et d’un artisanat réputé, le poumon de l’économie touarègue était le commerce caravanier dont l’accaparement fut l’un des enjeux de la colonisation européenne. » En effet, leur bonne connaissance de leur environnement et des étoiles leur permet alors de servir de guides aux caravanes transportant or et esclaves du sud du Sahara contre les produits manufacturés, le sucre ou le thé, exportés par les pays méditerranéens.

Période coloniale

C’est à la période coloniale qu’ont lieu les premiers contacts entre Touaregs et Occidentaux. Certains explorateurs les qualifient « d’hommes bleus du désert ». En 1864, le géographe Henri Duveyrier, qui a résidé sept mois auprès de Touaregs, écrit : « Toujours en vue de se soustraire la peau aux influences extérieures, les Touaregs se teignent les mains, les bras et la figure avec de l’indigo en poudre. Le reste de leur corps, également couvert d’indigo par la déteinte continuelle de leurs vêtements, est soumis aux mêmes effets. Les femmes emploient souvent, mais sur leur visage seulement, l’ocre au lieu de l’indigo. Ainsi, quoique blancs, ils paraissent bleus, et leurs femmes jaunes, ce qui contribue à leur donner un aspect si étrange. »

Société matriarcale

Les Touaregs étonnent aussi par l’organisation de leur société, très rigide, hiérarchisée et surtout matriarcale. Gardienne des traditions, la femme est écoutée et respectée. Elle enseigne aux enfants l’écriture tifinagh, l’une des premières écritures de l’humanité. Et c’est aussi par elle que s’établit la filiation.

Aujourd’hui estimée entre 1,5 et 3 millions de personnes (il n’existe aucun recensement précis), la population touarègue, qui privilégie les frontières naturelles aux frontières étatiques, est répartie entre plusieurs États africains : le Niger, le Mali, l’Algérie, le Burkina-Faso et la Libye. Pour « Un monde à part », François Mazure est parti à leur rencontre. Une immersion unique pour tenter de comprendre leurs traditions ancestrales et les enjeux – la sédentarisation forcée, la modernité ou les sécheresses – auxquels fait face aujourd’hui cette culture millénaire vouée à disparaître…

Cet article est paru dans le Télépro du 10/7/2025

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