C’est l’histoire d’une petite Bretonne… qui va libérer les Afghanes de leur voile.
L’histoire commence comme un conte de fées : une jeune Française tombe amoureuse d’un prince afghan… La suite aurait pu être romantique ou tragique, mais elle est historique. Élisabeth va devenir l’une des principales instigatrices de l’émancipation des femmes afghanes. Ce samedi à 20h35 sur La Trois, dans « Retour aux sources », « Une Française à Kaboul » raconte l’incroyable destin d’Élisabeth Bellay.
Une autre planète
Été 1928. Élisabeth se trouve par hasard dans la pharmacie de son père, à Saint-Malo, quand un jeune homme pousse la porte. Il s’appelle Naim Ziai. C’est un prince afghan. Entre les deux jeunes gens, c’est le coup de foudre. Les parents d’Élisabeth rêvaient pour leur fille d’un mariage à l’église, avec un bon gars du coin. L’Afghanistan, c’est une autre planète ! Mais les amoureux décident de se marier. Quelque temps après, le jeune couple rencontre le couple royal afghan, qui fait une tournée en Europe. Le roi Amanulla souhaite moderniser son pays. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il a envoyé son cousin Naim et quelques autres jeunes Afghans étudier à Paris. Tandis que Naim discute avec le Roi, Élisabeth fait connaissance de la reine Soraya. Elle a ouvert la première école pour filles à Kaboul. Elle aura bien besoin d’Élisabeth pour faire progresser la cause des femmes…
Recluse et répudiées
Élisabeth et Naim embarquent pour l’Afghanistan quelques mois plus tard. Mais alors qu’ils sont en route, le roi Amanulla est renversé par un rebelle conservateur. Quand la jeune femme arrive à Kaboul, elle doit porter le tchadri, ce vêtement couvrant la quasi-totalité du corps. Le Roi, exilé à Rome, propose au jeune couple de le rejoindre. Naim refuse. Il veut rentrer au pays. Même si cela condamne Élisabeth à une existence recluse, dans la maison familiale, avec les six épouses répudiées de son beau-père. Après avoir eu un fils, Hakim, Élisabeth donne naissance à deux filles : Sophia et Nassryne. Elle s’interroge sur leur avenir dans ce pays où les femmes n’ont aucun droit. Mais en 1934, l’Afghanistan adhère à la Société des Nations. Pour redorer l’image du pays, les autorités décident de rouvrir l’école des filles. Élisabeth propose immédiatement d’y travailler. Un jour de 1938, elle décide de rentrer de l’école non voilée. Elle est la toute première à oser ce geste révolutionnaire. Son combat féministe est lancé ! Dans les années qui suivent, elle crée des cours d’alphabétisation pour femmes, des ateliers où elles peuvent travailler, et même un salon de beauté.
La fille de la Française
Élisabeth dérange. Pourtant, elle est influente. En 1959, elle reçoit un coup de fil du Premier ministre. Persuadé que le pays doit se moderniser, il envisage d’abolir le tchadri. Peut-elle l’aider ? Sophia, son aînée, qui a maintenant 25 ans, pourrait-elle se rendre au travail sans voile ? Si ça fait scandale, on pourra toujours dire que c’est la fille de la Française. Or dans les rues de Kaboul, Sophia ne suscite aucune autre réaction que l’enthousiasme des femmes. Quelques semaines plus tard, lors de la Fête nationale, les femmes du Premier ministre et des hauts dignitaires se présentent sans tchadri. Et le mouvement fait tache d’huile… Élisabeth se réjouit : « Ma mission est achevée. Mes filles sont libres. » Toute la famille devra pourtant fuir le pays après l’invasion soviétique de 1979. Peu avant son décès en 1994, c’est le cœur serré qu’Élisabeth apprendra l’instauration de l’État islamique d’Afghanistan et le retour du tchadri…
Cet article est paru dans le Télépro du 5/6/2025