Qui sont les jeunes catholiques ? Quel est leur quotidien ? Malgré les scandales, la désaffection massive pour leur religion et la crise de confiance, pourquoi et comment restent-ils fidèles ? Tipik leur consacre un documentaire ce mardi à 21h55.
Comme les auteurs supposés des Évangiles canoniques, ils sont quatre. Comme Matthieu, Marc, Luc et Jean, ils ont décidé de témoigner de la vie de Jésus. Martin, David, Céline et Sophie ne sont pas contemporains de la vie de celui considéré par les chrétiens comme le Fils unique de Dieu, mais de la nôtre. Le premier s’apprête à entrer dans les ordres. Le deuxième est prêtre chaldéen, père de trois enfants. Céline, salariée de l’Église, voit son rapport à l’institution basculer après son mariage avec sa compagne. Quant à Sophie, elle mise sur son groupe de pop chrétienne pour évangéliser. Le documentaire proposé mardi par la chaîne publique propose leurs quatre portraits, quatre parcours de jeunes pour montrer une Église loin des clichés, qui cherche à se réinventer à travers celles et ceux qui y croient encore. Au-delà de ces cas particuliers, qui sont ces jeunes catholiques de Belgique ? Nous avons demandé à deux personnes qui en côtoient régulièrement de partager leur regard.
« Car là où deux ou trois sont assemblés en mon nom… »
Combien sont-ils ? Difficile de donner un chiffre exact. Quelques indications permettent d’avancer qu’ils sont de moins en moins nombreux. Dans son rapport 2025, la Conférence des évêques de Belgique indique une baisse importante des baptêmes, des premières communions, des mariages. Si la diminution de la pratique religieuse se confirme, des événements comme les Journées mondiales de la jeunesse (JMJ), il y a deux ans à Lisbonne, ou le Festival JMJ Belgium à l’abbaye de Maredsous mobilisent de très nombreux jeunes : 1,5 million au Portugal, plus de mille en province de Namur. « Je crois que c’est le côté festif qui rassemble », explique Anne-Sophie Montoisy. Pour la directrice de RCF (Radio chrétienne francophone) Namur et de RCF Sud Belgique, les jeunes sont plus attirés par les rassemblements populaires que par les messes et « leur rituel rébarbatif ». Autre problème à ses yeux, les homélies. « Quand elles sont tournées vers le côté social et s’ancrent dans la réalité, elles parlent aux jeunes. Dans le cas contraire, ils se sentent moins concernés. » Le partage, l’entraide, la solidarité ont bien plus de sens pour eux, « il s’agit de croire en quelque chose plus que de prier pour quelque chose », schématise Anne-Sophie Montoisy.
« Tu aimeras ton prochain… »
Théologien chez CathoBel (le portail officiel de l’Église catholique en Belgique francophone), Christophe Hérinckx voit la jeunesse évoluer. « La foi des 15-30 ans ne se vit plus comme celle de la génération précédente. Après Mai 68, il y a eu une prise de distance par rapport à l’aspect institutionnel trop dogmatique, professoral et moralisateur de l’Église. Le concile Vatican II a dit : la foi, ce n’est pas d’abord suivre des règles, c’est découvrir le Christ soi-même », rappelle-t-il.
En recherche de sens
Depuis une dizaine d’années, néanmoins, de plus en plus de jeunes, déboussolés, en recherche de sens « se tournent vers des influenceurs (…) qui leur disent comment croire, vivre la foi, pratiquer, prier… » L’Église se trouve démunie face à ce phénomène boosté par l’intelligence artificielle et les excès de ces prescripteurs « qui donnent des réponses simplistes (c’est comme ça et pas autrement), sorties du catéchisme ».
Chrétiens de demain
Et demain ? « Après cette phase, il faut évoluer, aller vers des chrétiens qui ne sont pas nostalgiques du passé », répond Christophe Hérinckx. « Les jeunes ne doivent surtout pas devenir des « djihadistes » du Christ, pour lesquels tout est bien ou pas bien, se protégeant du monde qui les entoure et devenant sectaires. J’espère qu’ils seront avant tout porteurs d’espérance, d’ouverture aux non-chrétiens, aux non-croyants, que leur foi sera plus mature. »
Cet article est paru dans le Télépro du 11/12/2025