Émissions alarmantes de gaz à effet de serre, surconsommation d’eau : le secteur en pleine explosion se taille un costume bien sombre. Ce lundi à 21h05, France 5 diffuse «Sur le front. Coton, laine : la face cachée de nos matières naturelles».
« Je n’ai vraiment plus rien à mettre. » Allez, sincèrement, vous n’avez jamais prononcé cette phrase ? À défaut, vous ne l’avez jamais entendue sous votre toit, alors qu’on se demande s’il ne va pas falloir installer un deuxième dressing ? Tandis que nos armoires débordent de vêtements, l’industrie textile se tricote un fameux bas de laine.
Chiffres fous
Au niveau mondial, le chiffre d’affaires de l’industrie textile passe son habit de lumière. Selon Research Nester, spécialisée en études de marché, il devrait atteindre 2.050 milliards de dollars (1.800 milliards d’euros) en 2025 contre 1.940 milliards de dollars (1.665 milliards d’euros) en 2024. D’ici 2037, ce chiffre devrait plus que doubler (4.910 milliards de dollars). Raisons principales : l’augmentation du secteur de vente électronique et la croissance de la demande dans le secteur de la mode. Le magazine économique américain Forbes estime que 59 % de la population mondiale a désormais accès à Internet. Cela fait du monde à habiller. La Belgique ? Elle fait un peu tache dans ce défilé de chiffres positifs. Pour Fedustra, la Fédération belge du textile, le chiffre d’affaires du secteur s’élevait à 5 milliards d’euros en 2024, marquant une légère baisse de 0,9 % par rapport à l’année précédente.
Coton et laine, même combat
Dans l’industrie de la mode, le coton et la laine sont deux des textiles les plus populaires et les plus courants. La laine, matière naturelle issue du poil des animaux (moutons, lapins, alpagas), est principalement produite en Australie et en Chine, mais d’autres pays comme la Nouvelle-Zélande, les États-Unis et la Grande-Bretagne sont aussi des producteurs importants. Le coton, fibre végétale, est principalement cultivé en Chine, en Inde et aux États-Unis (1er exportateur mondial). Depuis quelques années, le Brésil a significativement augmenté sa production au détriment de ces pays. La consommation mondiale de coton a doublé en cinquante ans, le secteur occupe 350 millions de personne dans le monde. Tout irait donc pour le mieux pour les deux textiles. Sauf que les défenseurs de l’environnement les pointent du doigt comme de véritables moutons noirs.
Dessine-moi un mouton
Comme Hugo Clément, qui réalise le reportage diffusé lundi sur France 5, vous pensiez que la laine venait de la tonte de moutons utilisés par ailleurs pour le fromage et la viande. Ce n’est pas tout à fait ça. Souvent élevés à l’autre bout de la planète, ils ne ressemblent guère au mouton du Petit Prince. Non seulement ils sont sélectionnés génétiquement depuis des décennies pour produire toujours plus de laine, mais à cause de ces transformations, ils sont très souvent mutilés à la naissance. En Australie par exemple, les éleveurs coupent la peau qui dépasse des parties génitales des agneaux pour prévenir les infections. Le coton ? Au Brésil, il est cultivédans des champs imbibés de produits chimiques. « Nous avons assisté à des épandages de pesticides par avion sur des milliers d’hectares », explique Hugo Clément. « J’ai aussi vécu une scène digne d’un film catastrophe : des salariés agricoles, vêtus de combinaisons, qui préparent des mélanges de produits toxiques dans d’énormes cuves pour les épandre sur les cultures de coton. »
Dans le coton, tout n’est pas bon
En plus des mauvaises conditions de travail et des bas salaires, au moins deux inconvénients supplémentaires mettent les nerfs des défenseurs de l’environnement en pelote. Les émissions de CO2 pour commencer. L’industrie textile génère entre 7 % et 10 % des émissions mondiales annuelles (plus que les vols internationaux et le transport maritime). La consommation d’eau ensuite. « Le secteur utilise 93 milliards de mètres cubes d’eau par an, soit 4 % des ressources mondiales en eau potable », indique sur son site Tressoi une marque de mode durable et éthique. Une solution : récupérer le coton de nos vieux vêtements et en fabriquer de nouveaux. Pour que l’idée soit à la mode chez le plus grand nombre, ça ne sera pas coton.
Cet article est paru dans le Télépro du 11/9/2025