
Ruth Bader Ginsburg, icône combative
Son nom ne vous dit probablement rien, sauf peut-être si vous avez déjà vu le film de Mimi Leder « Une femme d’exception », que RTL plug diffuse ce samedi à 20.15 et qui raconte quelques années de la tonitruante vie de Ruth Bader Ginsburg.
De l’autre côté de l’Atlantique, Ruth est une superstar. Icône féministe et héroïne de la gauche progressiste, elle n’a eu de cesse de défendre l’égalité des sexes à la Cour suprême, plus haute instance judiciaire des États-Unis.
9 contre tous
Ruth naît le 15 mars 1933 dans une famille juive de Brooklyn. Sa mère l’encourage à être indépendante et à poursuivre des études universitaires, décision rare pour l’époque. Elle obtient ainsi une bourse pour l’université de Cornell où elle tombe amoureuse à deux reprises : du droit et de Martin Ginsburg, qu’elle épouse après avoir obtenu son diplôme. Ensemble, ils décident de poursuivre leur cursus à Harvard, au Massachusetts. En 1956, Ruth est l’une des neuf femmes que compte sa promotion de cinq cents étudiants. « Pourquoi méritent-elles d’avoir pris la place d’un homme ? », leur a demandé le doyen de la Faculté lors du diner d’accueil… Suivant son mari qui a trouvé un poste à New York, elle reçoit son diplôme à l’université de Columbia, dont elle sort major de sa promotion, n’en déplaise aux idées reçues.
Égalité
Malgré son esprit brillant, aucun cabinet n’accepte pourtant de l’engager. « J’avais trois choses contre moi. Un, j’étais juive. Deux, j’étais une femme. Mais, le plus grave, c’était que j’étais la mère d’un enfant de 4 ans », dit-elle. Elle accepte alors un poste de professeur à l’université Rutgers et à Columbia, où elle devient la première femme à obtenir un temps plein. Grâce au contact de ses étudiants, elle a une vision précise des aspirations de la jeunesse à la fin des années 1960. Notamment l’égalité hommes-femmes. En 1972, elle cofonde le Women’s Rights Project au sein de l’UCLA (Union américaine pour les libertés civiles) pour lequel elle plaide devant la Cour suprême. Elle y défend l’idée que certaines lois de la Constitution sont sexistes, cantonnant les femmes à leur rôle de mères et de femmes au foyer, pendant que leur époux se doit de travailler.
Question de genre
La conception figée de la famille traditionnelle a pourtant implosé. Et pour convaincre les hommes de l’époque, quoi de mieux pour appuyer son propos que de faire reconnaître que certaines lois sont discriminatoires… envers les hommes ? Ce qu’elle prouve avec le cas d’un homme auquel sont refusées des allocations pour avoir pris soin de sa mère sous prétexte… qu’il n’est pas une femme. Son cheval de bataille : le XIVe amendement de la Constitution (1868). À l’origine rédigé pour protéger les droits civiques des anciens esclaves afro-américains, il garantit une protection par la loi égale à tous les citoyens et citoyennes des États-Unis. La discrimination fondée sur le genre est donc, selon Ruth, inconstitutionnelle. Plutôt que de prendre de front le problème, elle s’y attaque loi par loi, microchangement par microchangement. Sur les six cas qu’elle défend elle-même, elle en remporte cinq.
Consécration suprême
En 1980, elle est nommée à la cour d’appel du District de Columbia avant d’être nommée par Bill Clinton à la Cour suprême en 1993. C’est seulement la deuxième femme à y accéder. Elle y fait d’ailleurs installer des toilettes pour dames… La perte de son mari, les problèmes de santé, rien ne peut la détourner de sa vocation. À coups d’opinions dissidentes, Ruth forge sa réputation de coriace protectrice des droits des femmes, des minorités et de l’environnement.
Combat perdu
Le seul combat qu’elle perd finalement, c’est celui contre le cancer. Ruth Bader Ginsburg meurt à 87 ans, le 18 septembre 2020. La libération de son siège à Washington fait trembler les Démocrates, déjà en minorité. À juste titre. Donald Trump, alors Président, s’empresse de la remplacer par son exacte opposée, une Républicaine conservatrice, fervente catholique et farouchement opposée à l’avortement. Le 24 juin 2022, la Cour suprême annule l’arrêt « Roe vs Wade » (1973), laissant ainsi la possibilité aux États d’interdire le droit à l’interruption volontaire de grossesse…
Cet article est paru dans le Télépro du 6/3/2025
Imposteur
En 2016, RBG sort de sa réserve et de son devoir de neutralité en traitant Donald Trump, alors en plein campagne, « d’imposteur ». « Elle n’a plus toute sa tête », rétorque-t-il sur Twitter…
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