Un Belge sur dix est illettré

En Fédération Wallonie-Bruxelles, 38 % des élèves de 4e primaire sont considérés comme des « lecteurs précaires » © Getty Images/iStockphoto
Christine Masuy Journaliste

L’illettrisme n’a pas disparu : 10 % des Belges ont encore beaucoup de mal à lire et à écrire.

Mardi à 21h10, l’émission spéciale de France 2, « J’ai pas les mots », suit Cécile, Patrick, Sahar, Valentin… Ils sont d’âges et d’horizons différents, mais ont un point commun : ils sont illettrés. Pour parrainer la soirée, la chaîne française a fait appel à Kendji Girac. Issu de la communauté gitane, le chanteur a connu une scolarité chaotique. Quand il a été révélé par « The Voice » à 17 ans, il savait à peine lire et n’était pas capable d’écrire. En Belgique, un adulte sur dix éprouve les mêmes difficultés.

Scolarité obligatoire

Ne dites plus « analphabète » … Un analphabète est une personne qui n’a jamais appris à lire et à écrire. Certains d’entre nous ont encore eu des grands-parents analphabètes. Mais ce n’est théoriquement plus possible aujourd’hui puisque la scolarité est obligatoire en Belgique depuis 1914. S’il n’y a plus d’analphabètes, il reste cependant des illettrés. C’est-à-dire ? Des personnes à qui l’on a appris à lire et à écrire, mais qui demeurent néanmoins incapables de déchiffrer un texte de base. Cela concerne donc un adulte sur dix dans notre pays.

Belges de souche

Comment peut-on être illettré en Belgique ? « Ce sont les étrangers », diront certains. C’est effectivement une partie de l’explication. L’illettrisme atteint ainsi 19 % à Bruxelles, qui accueille une proportion plus importante de personnes nées à l’étranger. Notamment des femmes qui n’ont pas été alphabétisées dans leur pays d’origine. Mais l’illettrisme est également bien présent chez les Belges de souche. Selon les chiffres de l’IWEPS (Institut wallon de la statistique), en 2024, 10 % des Wallons de 25 à 89 ans ont au maximum un diplôme de l’enseignement primaire. Autre constat : ce n’est pas parce qu’on a été contraint de fréquenter l’école jusqu’à 12, 14, 16 ou 18 ans qu’on sait lire et écrire. Bien qu’ils soient scolarisés, certains décrochent très tôt…

Dis-moi de quelle famille tu viens…

Depuis 2006, la Fédération Wallonie-Bruxelles participe à l’enquête internationale PIRLS qui teste le niveau de compréhension en lecture des élèves de 10 ans. Cette enquête est menée tous les cinq ans en 4e primaire. La dernière date de 2021. Elle classe la FWB en dessous du niveau international. 38 % des élèves sont en effet considérés comme des « lecteurs précaires » – 11 % sont même « très précaires ». Le rapport souligne les écarts liés au statut socio-économique des enfants et de leur famille : « Alors qu’on ne compte que 1 % d’élèves favorisés n’ayant pas atteint le niveau bas de compétence, cette proportion atteint 18 % chez les élèves les moins favorisés sur le plan socioéconomique. À l’inverse, près de 50 % des élèves très favorisés peuvent être considérés comme de très bons lecteurs puisqu’ils atteignent les niveaux élevé (40 %) ou avancé (8 %). Parmi les élèves les plus défavorisés, seuls 6 % atteignent le niveau élevé et aucun le niveau avancé. » 

Kendji et les apprenants

Comment vit-on quand on est illettré ? Comment trouve-t-on du travail ? Comment ruse-t-on pour cacher ses lacunes ? Kendji Girac se souvient de l’angoisse qu’il a éprouvée après sa victoire dans « The Voice », quand Universal lui a soumis son premier contrat à signer… Aujourd’hui, il soutient tous les apprenants – ces adultes qui ont eu le courage de passer la porte d’une association pour apprendre à lire et à écrire. On estime qu’ils sont 5.000, chaque année, en Fédération Wallonie-Bruxelles.

Cet article est paru dans le Télépro du 4/9/2025

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