Dècès du chanteur Arno, icône de la scène rock belge

Le chanteur belge Arno lors d'un concert à Paris au théâtre Trianon le 11 février 2020 © AFP/Archives Christophe ARCHAMBAULT

Le chanteur Arno, figure belge de la scène rock, connu pour sa voix cassée mâtinée d’un accent flamand, sa chevelure en bataille et ses excès, est décédé samedi à l’âge de 72 ans, des suites d’un cancer.

L’artiste, devenu une icône nationale dans son pays et parfois comparé à Alain Bashung ou Tom Waits, de la même génération que lui, avait annoncé en février 2020 souffrir d’un cancer du pancréas.

« Putain, putain c’était vachement bien. Arno nous a quitté. Il va nous manquer à tous, sa famille, ses amis, ses musiciens, mais il sera toujours là grâce à la musique qui l’a fait tenir jusqu’au bout », a écrit son agent belge Filip De Groote dans un communiqué.

Né le 21 mai 1949 à Ostende, ville côtière flamande à laquelle il est resté très attaché et qu’il évoque dans ses chansons, Arno Hintjens avait débuté sa carrière au sein du groupe rock TC Matic dans les années 80, avec notamment la chanson « Putain, putain » (« Putain, putain, c’est vachement bien, nous sommes quand même tous des Européens ») — reprise récemment en duo avec un autre Belge, Stromae.

C’est en solo qu’il s’était ensuite révélé à un plus large public, grâce à des chansons comme « Les yeux de ma mère » ou sa reprise des « Filles du bord de mer » d’un autre Belge, Adamo.

« C’est un immense chanteur et poète, le monument national belge. Et un monument d’Europe, avec +Putain, Putain…+ Il part au moment où on a le plus besoin d’Europe », a réagi auprès de l’AFP Boris Vedel, directeur du festival du Printemps de Bourges, où était passé Arno.

« Âme européenne »

Le 21 février dernier, dans son habituel costume noir de scène, Arno avait été reçu sous les ors du palais royal de Bruxelles par le roi Philippe, qui avait salué « une icône de la scène belge ».

Le chanteur belge, qui assurait « ne pas avoir de frontières dans la tête », « incarnait une certaine belgitude, la fusion du Nord et du Sud du pays, l’âme européenne et bien sûr tant de poésie », a abondé samedi Céline Tellier, ministre wallonne de l’Environnement.

« Rust zacht (repose en paix) Arno. C’était magnifique! », a réagi le Premier ministre belge Alexander De Croo dans un message bilingue.

Ostende « en deuil » a salué « une légende vivante », « l’un de ses principaux ambassadeurs ». A Bruxelles, dont il était citoyen d’honneur, « nous ne verrons plus sa silhouette dans le quartier Sainte-Catherine. Putain putain, il nous manque déjà », s’est désolé le maire Philippe Close.

Arno avait annoncé sa maladie en pleine promotion d’un album (« Santeboutique », sorti en septembre 2019). Il avait dû interrompre sa tournée pour subir une opération. La pandémie a ensuite contrarié la reprise des spectacles, même s’il a pu enregistrer un nouvel album (« Vivre », avec le pianiste français Sofiane Pamart, sorti fin mai 2021) avant une nouvelle hospitalisation.

Il était finalement remonté sur scène en février 2022, programmant une demi-douzaine de dates à Bruxelles et à Ostende pour une tournée baptisée « Vivre », ces cinq lettres éclairant en rouge une scène plongée dans le noir.

« Seule compte la vérité »

Durant ses derniers shows, l’artiste, assis devant un micro, visage amaigri, faisait régulièrement allusion à son état de santé.

A la fin d’un morceau dans lequel il sifflotait accompagné au piano il avait ironisé sur ses hésitations et ses supposées capacités amoindries : « Désolé pour le sifflement, ça marche plus comme avant, c’est comme mon zizi », avait-il lancé, déclenchant les rires de l’assistance.

« Le prochain morceau s’appelle Lady Alcohol, j’ai une relation avec elle et c’est fini, je suis content », disait également le chanteur, père de plusieurs garçons mais très discret concernant sa vie privée.

Il a cependant souvent évoqué sa mère, décédée prématurément. Récemment, après avoir chanté sur scène « Les Yeux de ma mère », un de ses titres les plus connus, il avait confié au public qu’il allait bientôt aller la rejoindre « là-haut ».

Pour préserver ses forces le chanteur avait dû annuler la dernière date de cette mini-tournée, le 15 mars à l’Ancienne Belgique (AB), salle rock mythique de Bruxelles.

« Dans l’état dans lequel je suis aujourd’hui, le passé n’existe plus, seule compte la vérité », confiait Arno le 23 mars lors d’un ultime entretien à France Inter. « La musique me sauve encore en préservant mon état d’esprit », ajoutait-il, assurant préparer encore un album et avoir écrit une chanson destinée à être interprétée avec… Mireille Mathieu.

« J’ai eu une vie merveilleuse, j’ai voyagé partout dans le monde grâce à la musique, j’ai joui de la vie. Je prends ce bonheur avec moi. Merci la vie! », concluait-il.

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