Écran thérapie : le ciné, c’est bon pour la santé !

Pour Virginie Efira, «Dirty Dancing» mériterait de figurer au Panthéon des plus grands films © Isopix

Regarder un film est un moyen de se détendre. Mais aussi de trouver du réconfort en cas de questionnement ou un effet exutoire lors de moments difficiles. La «ciné-thérapie», déjà utilisée aux États-Unis, est un autre moyen de passer sur le divan…

«Parce que beaucoup de films transmettent des idées par l’émotion et non par l’intellect, ils neutralisent notre propension à réfréner nos sentiments», explique Birgit Wolz, psychologue californienne spécialisée dans les fictions et auteure d’«E-motion Picture Magic». Les soignants qui utilisent la ciné-thérapie ou filmothérapie depuis vingt ans aux États-Unis voient dans les œuvres sur écran des outils permettant, à travers leur contenu, de nous concentrer sur nos problèmes réels et de libérer notre parole sur la façon de les résoudre ou, du moins, de les alléger. Nos préférences et choix cinématographiques ne seraient donc pas toujours fortuits.

Se soigner avec le drame

Afin de démontrer que l’intrigue des films représente une opportunité de mieux se connaître et de comprendre ce qui se passe dans nos vies, le journal Medicinanarrativa.eu a mené en 2019 une enquête auprès de 70 personnes d’Italie, de Suisse, du Royaume-Uni, du Luxembourg et d’Espagne. Le genre de films le plus regardé durant une période de maladie ou de tristesse est le drame (37 %), suivi par la comédie (14 %), le fantastique (8 %), les séries télé (8 %), le romantisme (5 %), la comédie musicale (5 %) et l’action (3 %).

L’écrivain-essayiste italien Milo Silvera commente : «Le dramatique prévaut car il a toujours été un grand moteur d’émotions. Et le conflit est toujours attrayant : vous devez prendre position, vous identifier à des personnages. (…) Le film dramatique est à la base de tout, c’est une représentation de la vie où le protagoniste peut finir mal ou bien.»

À chacun son ordonnance

Quant aux comédies : «Elles montrent un point de vue humain où le poids du drame devient léger. Voilà pourquoi un film tel « Intouchables » est apprécié : il y a une personne en situation de handicap, et donc de fragilité, mais aussi la compassion, l’ironie, la sympathie, l’action. Les comédies sont réconfortantes.» Concernant les films fantastiques, dont les sagas «Harry Potter», «Le Seigneur des anneaux» ou «Stars Wars» : «On a parfois besoin d’épopées, de rêve, de magie et de voir d’autres mondes où a lieu la lutte éter nelle entre le bien et le mal !» Mais c’est à chaque spectateur de se faire son cinéma, son «ordonnance» en repérant les films qui le «réparent» le mieux : «C’est comme choisir un livre. À l’instar d’une bibliothèque idéale, nous devons avoir une cinémathèque idéale !»

Bon pour le cœur

«Comme l’art-thérapie ou la musicothérapie, vous pouvez intégrer les films à une thérapie traditionnelle, car ce sont des outils thérapeutiques naturels», soutient Gary Solomon, psychothérapeute qui se fait appeler le «médecin du cinéma» et a été le premier, dans les années 1990, à «prescrire» des films à ses patients comme aides à la santé mentale. Dans son livre «The Motion Picture Prescription», il rassemble 200 films, répertoriés en 17 catégories (abandon, amitié, décès, sexualité, etc.). Ses confrères classent la comédie comme genre le plus recommandé. «Rire devant un film comique provoque une dilatation des vaisseaux sanguins de 22 %. En riant au cinéma, vous réduisez votre tension artérielle autant qu’avec un exercice physique», dit le Dr Michael Miller, du Centre de cardiologie de l’Université du Maryland. «On devrait regarder des films qui font vraiment rire du ventre au moins 15 minutes par jour ! Ça soulage aussi l’anxiété, réduit l’agressivité, la peur, et permet d’aborder nos soucis avec une perspective plus fraîche et distanciée.»

Frissons de plaisir

Les thrillers, suspenses et épouvantes ne sont pas en reste. «Les films d’horreur apportent un soulagement, même s’ils vous stressent en premier !», précise Birgit Wolz. «Vous ressentez une libération cathartique lorsque le héros échappe de justesse à la catastrophe ou qu’un personnage négligé triomphe contre vents et marées. Devant un suspense, notre cerveau libère du cortisol, l’hormone du stress. Mais au dénouement du récit, on sécrète de la dopamine, un opioïde naturel qui provoque des sentiments de plaisir !»

Les films qui ont marqué vos stars préférées…

Johnny Depp et «Le Magicien d’Oz» : «Jeune, j’espérais qu’une tornade m’emporte, comme Judy Garland dans le film, et m’éloigne de la vie que je menais à l’adolescence !» (GQ)

Uma Thurman et «Confidences sur l’oreiller» : «Toute ma vie, j’ai voulu être l’actrice Doris Day. Surtout dans «Pillow Talk» (le nom du film en VO, ndlr). C’est un film léger, pétillant, romantique et si amusant à regarder quand l’héroïne féministe succombe au charme de son voisin macho !» (Variety)

Vin Diesel et «Autant en emporte le vent» : «Je m’identifie au personnage de Clark Gable, ce type qui ose être franc et dit à la dame : « Je suis peut-être rude sur les bords, mais je suis le meilleur pour toi ! »» (Insider)

Virginie Efira et «Dirty Dancing» : «Je le dis avec sérieux : je crois que c’est un très grand film, qu’il est fondamental dans la construction d’adolescente à femme, dans le mystère de la féminité, de la sexualité. Il n’est pas au panthéon des meilleurs films à côté de « Citizen Kane ». Mais je l’y mettrais quand même…» (Europe 1)

Marion Cotillard et «Frangins malgré eux» : «C’est le film qui m’a fait le plus rire. J’ai une passion pour John C. Reilly et Will Ferrell. Déjà eux me font rire, notamment Ferrell dont j’ai dû voir tous les films. C’est un humour qui me touche particulièrement, qu’on peut qualifier de gras parfois, mais que je trouve aussi extrêmement subtil.» (Europe 1)

Brad Pitt et «La Maison sur l’océan» : «J’ai pleuré quand Kevin Kline, qui joue un architecte, apprend qu’il est atteint d’un cancer en phase terminale et décide de finir de construire une maison avec son fils pour se réconcilier avec lui. Ce film m’a chamboulé !» (WMagazine)

Emmanuelle Béart et «Out of Africa» : «Je l’adore pour la musique, pour l’histoire d’amour. J’adore pleurer, moi. Dans la vie, beaucoup moins. Mais j’adore pleurer au cinéma et j’aime qu’un film m’embarque de cette façon-là !» (Europe 1)

Shannon Purser et «Scream» : «Je crie et ça fait du bien ! C’est un de ces films d’horreur qui se moquent des autres films du même genre et j’adore ça !» (Insider)

Kad Merad et «La Vie est belle» : «James Stewart est mon acteur préféré et il n’y a pas plus émouvant que ce récit. Je pleure de la première à la dernière seconde. Le film est un peu naïf, mais si beau, intelligent et bien joué.» (Popcorn)

Eva Green et «Mary Poppins» : «J’aime le moment où Mary et ses amis sautent dans un dessin peint sur le trottoir et atterrissent dans cet autre univers. Ce serait bien de sauter dans une image, d’y passer un bon moment, puis hop! on revient à la réalité !» (Popcorn)

Cet article est paru dans le Télépro du 2/09/2021.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici