Face à la polémique, Médine renonce à se produire au Bataclan

Face à la polémique, Médine renonce à se produire au Bataclan
AFP

Objet d’une intense polémique, le rappeur Médine, accusé notamment à droite de complaisance envers l’islamisme, a fini par annuler ses deux concerts prévus mi-octobre au Bataclan, touché en novembre 2015 par une attaque jihadiste.

Une décision prise, selon la salle, « par respect des victimes des attentats du 13 novembre 2015 et de leurs familles » et dans « une volonté d’apaisement ».

Des mouvements d’extrême droite et des proches de victimes du Bataclan depuis plusieurs semaines à organiser des manifestations devant la mythique salle de concert, où 90 personnes ont été tuées.

« Certains groupes d’extrême droite ont prévu d’organiser des manifestations dont le but est de diviser, n’hésitant pas à manipuler et à raviver la douleur des familles des victimes », affirme le rappeur de 35 ans vendredi sur son compte Facebook.

« Par respect pour ces mêmes familles et pour garantir la sécurité de mon public, les concerts ne seront pas maintenus », dit-il, évoquant une « décision douloureuse ». Les deux dates affichaient complet.

« Tout ce que je voulais faire c’était le Bataclan », écrit le rappeur à ses fans. Il leur donne rendez-vous le 9 février au Zénith, une salle plus grande où les deux concerts ont été reprogrammés.

« Cette provocation n’avait pas sa place dans cette salle, compte tenu de son histoire douloureuse », a commenté sur Twitter Marine Le Pen, présidente du Rassemblement national, saluant « une victoire pour toutes les victimes du terrorisme islamiste ».

Sur la toile, les tenants de #PasdeMedineauBataclan et des proches de victimes ont également fait part de leur satisfaction.

L’un d’entre eux, Patrick Jardin, père de Nathalie, tuée le 13 novembre 2015, a remercié le rappeur et la salle de concert, qu’il qualifie de « sanctuaire », « d’avoir accepté de déplacer leur concert dans un autre endroit ».

« Je ne suis pas facho (…) MAIS je refuserai toujours que Médine ou un autre vienne piétiner les corps de ma fille et des autres victimes au Bataclan », écrivait-il début septembre sur Twitter pour justifier ses positions.

– Salle de concert ou sanctuaire ? –

La programmation au Bataclan du rappeur havrais avait été dénoncée dès le mois de juin par des responsables politiques de droite et d’extrême droite.

En cause: certaines anciennes chansons du rappeur comme « Jihad » ou « Don’t Laïk », considérées comme allant dans le sens des thèses jihadistes islamistes.

Dans ce dernier morceau sorti en janvier 2015, une semaine avant l’attentat de Charlie Hebdo, Médine s’attaquait à la laïcité avec des punchlines comme « Crucifions les laïcards comme à Golgotha » ou encore « je scie l’arbre de leur laïcité avant qu’on le mette en terre ».

La polémique enflant, il avait contre-attaqué mi-juin. « Voilà 15 ans que je combats toutes formes de radicalisme dans mes albums », assurait-il, avant de s’en prendre à l’extrême droite. « Allons-nous (la) laisser dicter la programmation de nos salles de concerts voire plus généralement limiter notre liberté d’expression? »

L’avocat Philippe de Veulle dit avoir transmis jeudi « une demande d’enquête préliminaire » auprès du parquet de Paris en visant des faits d’ »incitation à la haine, à la violence et aux discriminations » dans les textes du rappeur.

Il défend deux parties civiles de nationalité italienne dont une blessée par balle au Bataclan.

Après l’annulation des deux concerts de Médine, il a salué vendredi « une première victoire pour les souffrances des victimes et de leur ayant-droits, mais cela ne retire en rien ces propos outrageants qui ont un caractère violent et discriminatoire ».

Cette polémique pose la question du statut du Bataclan: salle de spectacle comme les autres ou à l’inverse, sanctuaire? A sa réouverture, un an après l’attentat, ses patrons avaient clamé leur intention de ne pas faire un « mausolée » de ce lieu.

Au début de la controverse, Life for Paris, la principale association de victimes, était venue à la rescousse du Bataclan en soulignant que la salle « est complètement libre de sa programmation, sous contrôle de la préfecture de police de Paris ».

Sur une tout autre ligne, l’association « 13onze15 Fraternité Vérité », avait de son côté jugé que le Bataclan commettait « une faute » en programmant Médine.

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