Indonésie: un président surnommé Jokowi, histoire d’un vieil ami français

Indonésie: un président surnommé Jokowi, histoire d'un vieil ami français
AFP

Le nouveau président de l’Indonésie s’appelle Joko Widodo mais tout le monde le surnomme Jokowi. Et cette contraction entre prénom et nom a été inventée par un vieil ami français, Bernard Chêne, qui l’appelait à double titre « Joko oui ».

Peu après la victoire de l’outsider Jokowi à l’élection présidentielle de juillet dans ce pays d’Asie du Sud-Est de 250 millions d’habitants, un journaliste du quotidien Jakarta Post lui a demandé comment il fallait dorénavant l’appeler. « Simplement Jokowi », a répondu le président âgé de 53 ans, intronisé la semaine dernière.

Ce surnom utilisé aussi bien en Indonésie qu’à l’étranger remonte à une vingtaine d’années, lorsque Jokowi était un jeune fabricant de meubles de jardin en teck, un arbre tropical produisant un bois précieux, raconte à l’AFP Bernard Chêne, qui l’a rencontré dans la partie centrale de Java, île la plus peuplée de l’archipel.

Jokowi s’en souvient très bien. Peu avant la cérémonie d’investiture le 20 octobre, « il disait à des journalistes, +Quand on s’est vu la première fois avec Bernard, il y a eu une confiance réciproque qui est passée+ », ajoute le Français âgé de 71 ans.

A l’époque, Bernard Chêne faisait fabriquer du mobilier de jardin en teck pour la France : « Quand je l’ai rencontré, je lui ai dit, Joko Widodo c’est un peu compliqué pour moi, alors si t’es d’accord, je vais t’appeler Jokowi, ça fait un raccourci sympa, et ça a été le départ de l’appellation. »

Puis, les affaires entre les deux hommes se sont progressivement développées, et « j’ai toujours eu des oui de Jokowi. Je l’ai ainsi appelé à double raison +Joko oui+ ».

Depuis, Joko Widodo est devenu Jokowi pour le public et les médias, dans un pays qui affectionne les surnoms et diminutifs. Ainsi, l’ancien président, Susilo Bambang Yudhoyono, est surnommé SBY, et un autre ex-chef de l’Etat, Abdurrahman Wahid, est devenu Gus Dur, Gus étant un titre familier javanais et Dur le diminutif d’Abdurrahman.

– ‘Conte de fée’ –

Après avoir cessé son activité en 2003, Bernard Chêne a continué de garder contact avec la famille Jokowi, « des gens d’une très grande simplicité ».

Une affiche electorale de Joko Widodo dit

En 2005, lorsque Jokowi a été élu maire de Solo, sa ville natale d’un demi-million d’habitants sur l’île de Java, « on lui a fait la surprise avec son cousin Darmanto de se rendre à la mairie » pour son investiture, relate le Français.

« Il était absolument surpris et ému : +Mais enfin, tu ne m’as pas oublié, tu es toujours mon ami ?+ », lui avait lancé Jokowi. Les deux hommes ne s’étaient pas revus depuis quelques années.

Bernard Chêne était alors peu étonné que Jokowi décroche la mairie de Solo : « Le personnage est tellement fiable et tellement simple, il anticipe énormément les choses, il est clairvoyant. » Devenu très populaire, Jokowi a été réélu triomphalement pour un second mandat.

En 2012, lorsque Jokowi a été propulsé gouverneur de Jakarta, « j’étais estomaqué », décrit le Français en référence à l’ascension fulgurante en politique du jeune fabricant de meubles. Et quand il a été question de Jokowi candidat à la présidentielle, « j’étais complètement surpris, c’était un peu un conte de fée ».

Le président indonésien Joko Widodo dit

La tâche de Jokowi s’annonce difficile dans le plus grand pays musulman au monde, parce qu’il n’a aucune expérience en politique nationale.

Le lendemain du scrutin, le Français établi en région parisienne a reçu un coup de téléphone de Jokowi en personne : « Bernard, j’ai besoin de mes vrais amis, j’ai besoin que tu sois là le 20 octobre » à la cérémonie d’investiture.

Ravi, le Français a fait le déplacement en Indonésie et rencontré Jokowi au palais présidentiel. « Il est venu plusieurs fois vers moi, on a fait quelques photos, on a parlé un peu, il est toujours aussi direct, clairvoyant mais simple. »

La veille de la cérémonie, raconte Bernard Chêne, il a aussi rencontré la nouvelle première dame d’Indonésie, Iriana Widodo, sur la terrasse du palais présidentiel : « Il y avait des journalistes, elle leur a dit +Voilà l’ami français de Jokowi+. »

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