Roman Polanski, artiste surdoué et complexe

Roman Polanski, artiste surdoué et complexe
AFP

Le cinéaste franco-polonais Roman Polanski, dont l’extradition aux Etats-Unis a été refusée par un tribunal polonais, est un artiste complexe, auteur d’une oeuvre non conformiste, et à la vie émaillée de drames.

Réalisateur surdoué, acteur, scénariste et producteur, il a bâti en une quarantaine de longs métrages une oeuvre souvent teintée de pessimisme, marquée par de grands films : « Cul de sac » (1966), « Le Bal des vampires » (1967), « Rosemary’s Baby » (1968), « Chinatown » (1974), « Le locataire » (1976), « Tess » (1979), « Le pianiste » (2002) ou encore « La Vénus à la fourrure » qui lui a valu le César 2014 du meilleur réalisateur.

Né le 18 août 1933 à Paris de parents juifs polonais qui retournent en Pologne trois ans avant le début du conflit mondial, Raymond Liebling (son nom patronymique jusqu’à ce que son père le change en Polanski), est marqué par son enfance dans le ghetto de Cracovie.

Ses parents sont envoyés en camp de concentration, d’où sa mère ne revient pas.

Seul dès l’âge de huit ans, il survit dans les bois avec d’autres enfants, avant d’être recueilli par des paysans et de frôler la mort au moment de la chute d’un obus.

Il tirera de cette expérience son film le plus personnel, « Le Pianiste », où Adrien Brody campe un survivant du ghetto de Varsovie. Le film décrochera tout : Palme d’or à Cannes, Oscars, Césars (plus hautes récompenses du cinéma français), etc.

Diplômé de l’institut du cinéma de Lodz (Pologne) en 1959, il commence sa carrière en 1962 avec le thriller psychologique « Le couteau dans l’eau ».

Le succès de « Répulsion », où Catherine Deneuve campe une meurtrière démente, lui ouvre les portes d’Hollywood.

Du bonheur au cauchemar

L’aventure américaine dure 10 ans, semée de bonheurs – mariage avec l’actrice Sharon Tate, succès internationaux – et de cauchemars, à commencer par l’assassinat monstrueux, en 1969, de son épouse, enceinte de huit mois, par des satanistes disciples de Charles Manson.

Huit ans plus tard, Polanski, alors agé de 43 ans, se retrouve enfermé dans la prison où avaient été détenus les assassins de sa femme. Il est accusé d’avoir eu des relations sexuelles avec une mineure de 13 ans, Samantha Geimer, pendant une séance de photos.

Elle témoignera plus tard avoir été sous l’emprise de la drogue et de l’alcool. Le cinéaste dira qu’elle semblait plus âgée.

Libéré après quelques semaines, mais menacé d’être remis sous les verrous, Polanski fuit les Etats-Unis. Et lorsque « Le Pianiste » remporte trois Oscars en 2003, il ne peut se rendre à Hollywood recevoir les trophées.

Le réalisateur est rattrapé par cette affaire le 26 septembre 2009. Arrêté à son arrivée à Zurich à la demande des autorités américaines, il est assigné à résidence avec bracelet électronique dans son chalet de Gstaad (Alpes suisses) en décembre. Polanski ne retrouve sa liberté de mouvement qu’en juillet 2010 après le rejet par la Suisse de la demande d’extradition des Etats-Unis.

Dans un livre publié en 2013, Samantha Geimer disait lui avoir pardonné.

Naturalisé français en 1976, Polanski s’était alors installé à Paris, poursuivant son parcours accidenté entre succès (« Tess » en 1979), fiasco (« Pirates » en 1984) et égarement érotico-triste (« Lunes de fiel » en 1992, avec sa compagne, Emmanuelle Seigner).

Au début des années 2000, il était revenu au premier plan avec « Le Pianiste », puis en 2010 avec « The Ghost Writer », thriller mettant en scène un ex-Premier ministre britannique, qui lui avait valu l’Ours d’argent du meilleur réalisateur au Festival de Berlin et le César 2011 du meilleur réalisateur.

Son dernier César – le quatrième en tant que meilleur réalisateur et le huitième de sa carrière – récompensait « la Vénus à la fourrure » (2014), un huis clos théâtral entre un metteur en scène et une actrice sur fond de sadomasochisme.

« Aux yeux de bien des gens, je passe pour une espèce de gnome et de débauché, mais mes amis – et les femmes de ma vie – savent à quoi s’en tenir », écrivait Roman Polanski dans son autobiographie, en 1984.

Depuis 1989, il est marié, en troisièmes noces, avec l’actrice française Emmanuelle Seigner qui lui a donné deux enfants.

 

 

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