Antispécistes : pour les bêtes, ils réclament justice !

Des manifestations antispécistes tentent de faire entendre la voix des animaux © RTBF/RTS

Les antispécistes, qui font de la cause animale leur combat, ont une vision du monde refusant la notion de hiérarchie entre les espèces animales. Ce lundi à 21h05, La Trois part à leur rencontre avec le documentaire «Les Antispécistes, guerriers de la cause animale».

Occupation d’abattoirs, libération d’animaux, vidéos volées… Certains antispécistes mènent des actions coup de poing. Leurs missions choc sont à voir lundi soir sur La Trois.

Si nombre d’entre nous se sont familiarisés avec le vocable entourant le régime végétarien et le mode de vie végan, la notion d’antispécisme est plus floue. Vulgarisé, chez nous, par Aymeric Caron (ex-chroniqueur d’«On n’est pas couché» sur France 2), l’antispécisme part du principe que toutes les espèces ont droit au respect et refuse la supériorité de l’être humain. Entre philosophie et idéologie, que défend réellement ce concept ?

Aux origines

Le terme d’antispécisme est inventé en 1970 par le psychologue britannique Richard Ryder. Cinq ans plus tard, les notions de spécisme et d’antispécisme sont popularisées par le philosophe australien Peter Singer dans «La Libération animale», qui devient vite un best-seller.

Si ces néologismes existent depuis un demi-siècle, l’idée de considérer la faune et la flore avec plus de respect s’est répandue dès la fin de la Seconde Guerre mondiale. Mais en remontant bien plus loin, de nombreuses réflexions entourant la cause animale se retrouvent chez des philosophes comme Empédocle (Ve siècle avant J.-C.), dans les écrits de Porphyre (IIIe siècle) ou sous la plume de Voltaire (XVIIIe siècle). Dans son «Dictionnaire philosophique», ce dernier s’indigne : «Il ne leur manque que la parole ; s’ils l’avaient, oserions-nous les tuer et les manger ? Quel est le barbare qui pourrait faire rôtir un agneau, si cet agneau nous conjurait par un discours attendrissant de n’être point à la fois assassin et anthropophage ?»

Actions coup de poing

Cinquante ans après l’élaboration du concept d’antispécisme, les héritiers de Peter Singer, toujours actif dans son militantisme, sont nombreux et emploient régulièrement des méthodes choc pour conscientiser la société à la cause animale. C’est le cas de l’association L214 qui diffuse notamment des vidéos sur l’intérieur des abattoirs ou participe à des actions pour libérer des animaux.

Au cœur de faits divers, certains militants sont parfois accusés de dégrader des devantures de boucheries, par exemple. Cette façon radicale de dénoncer les traitements infligés aux animaux n’incite évidemment pas à adhérer à leur cause… Et Peter Singer lui-même de s’insurger : «Je rejette complètement la violence commise au nom de la libération animale», affirme-t-il dans Le Point.

Dérive extrême ?

Au-delà des actes, c’est tout le discours des antispécistes que certains refusent. Ainsi la journaliste Ariane Nicolas considère cette doctrine comme une nouvelle forme d’extrémisme politique et s’inquiète de ses potentielles dérives. Dans son essai «L’Imposture antispéciste», elle qualifie cette idéologie de «zoocentrisme poussé à un tel degré que notre humanité même pourrait un jour se dissoudre dans la grande chaîne indifférenciée des ’animaux non humains’».

L’important : le «sentient»

Dans les débats entourant l’antispécisme, une question, un brin caricaturale, revient souvent : peut-on raisonnablement mettre sur pied d’égalité un moustique et un humain ? Entre ici en jeu le concept de «sentience», soit la capacité d’éprouver des choses subjectivement, d’avoir des expériences vécues.

«La notion centrale de l’antispécisme, ce n’est pas le vivant mais le sentient. Les êtres vivants qui peuvent éprouver des émotions», détaille Estiva Reus, membre de la rédaction des Cahiers antispécistes et militante pour l’association L214 (source : Le Figaro).

De là à savoir si une mouche ressent de la même manière qu’un cochon ou un humain, la question reste en suspens, même pour Peter Singer : «Je dirais simplement que nous ne savons pas si les insectes ressentent de la douleur, et si c’est le cas, lesquels»

Cet article est paru dans le magazine Télépro du 7/1/2021

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici