Écrans : tomber ou non dedans ?

Ils sont partout et semblent indispensables. Lors de leur apparition, leurs fabricants affirmaient que la machine avait été créée pour être au service de l’homme. Comment faire pour que cela ne devienne pas le contraire ? Maria Del Rio scrute tous les écrans de très près dans «Tout s’explique», ce jeudi à 19.50…

L’idée germe depuis plusieurs années, et même décennies, que la technologie des écrans allait un jour surpasser l’utilisation pour laquelle le concept fut initialement inventé. Et la procédure s’est développée bien plus rapidement que redoutée…

Duras visionnaire

Sans boule de cristal ni recherche scientifique, à la seule force de sa sensibilité d’écrivaine captant l’air du temps, Marguerite Duras avait imaginé, en 1985, comment serait le XXIe siècle et notamment les écrans. Ses dires apparaissent stupéfiants : «Je crois que l’homme sera littéralement noyé dans l’information. Une info constante. Sur son corps, son devenir corporel, sa santé, vie familiale, salaire, loisirs. Ce n’est pas loin du cauchemar. Il n’y aura plus personne pour lire, ils verront de la télé. On aura des postes (ndlr : écrans) partout, dans la cuisine, les water-closets, le bureau, les rues. (…)». Et de conclure sur une note rassurante : «Puis les gens vont redécouvrir la lecture. Un homme, un jour lira. Et tout recommencera».

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Pub en rue : tous fichés !

Le 11 août dernier, Pieterjan Van Leemputten, journaliste pour Data News, a publié une info édifiante. Les écrans pub de Clear Channel, ces panneaux animés, plantés dans les rues, gares et abribus vont bientôt espionner les Européens (dont les Belges), comme ils le font avec les Américains depuis quatre ans. Leur tactique : une technologie baptisée «Radar» recense combien de gens passent devant le panneau et identifie ceux qui le regardent grâce à leurs données GSM ! «Chaque panneau obtient un score et les annonceurs voient quel type de personne a visionné leur publicité», dit le spécialiste. «Ces données sont rendues anonymes afin de respecter la réglementation européenne. (…) Aucun nom ou numéro n’est accolé au trajet de quelqu’un.» Mais en pratique, «les gens sont identifiés selon leur âge, revenus et préférences pour les courses, et reçoivent de la pub sur mesure.»

Nos enfants, ces poissons rouges

Dans «La Civilisation du poisson rouge» (éd. Grasset, 18 e), le reporter Bruno Patino s’intéresse aux méfaits des écrans et notamment à une étude du Journal of Social and Clinical Psychology. Selon cette publication, 30 min serait le temps maximum d’exposition aux écrans, au-delà, il y aurait menace pour la santé mentale. Patino développe : «Les ingénieurs de Google sont parvenus à calculer la durée maximale de l’attention d’un poisson rouge dans son bocal : 8 secondes. Ils ont aussi évalué la durée d’attention de la génération des ’millenials’ (ndlr : générations nées avec les écrans) : 9 secondes !» Et de prévenir : «Nous sommes devenus des poissons rouges, enfermés dans le bocal de nos écrans, soumis au manège de nos alertes et de nos messages instantanés.»

Pour découvrir la suite de cet article, rendez-vous dans le Télépro paru le 27 août 2020