Che Guevara, naissance d’un mythe

Le «Che» adulé de ses courtisans © France 5

Depuis sa mort il y a cinquante-deux ans, le Che demeure une figure de la révolution. Cinéphile, écrivain, photographe, Ernesto Guevara n’a eu de cesse de construire le mythe qui lui survivra.

Le Che a 29 ans, en 1957, lorsqu’il s’exprime pour la première fois devant la caméra d’un journaliste qui réalise un reportage dans la sierra Maestra. Celui qui a compris l’importance d’«informer et impliquer le peuple», explique le journaliste et biographe Jon Lee Anderson, et de ne «pas rester refermé sur soi-même», crée en 1958 son propre organe de presse : «Radio Rebelde». 

Pour l’historien Salim Lamrani, «cela a été peut-être le premier réseau social de l’histoire». Fidel Castro y lance son appel à la grève générale le 1er janvier 1959. Le 8 janvier, les troupes révolutionnaires entrent dans La Havane. Encore méconnu du peuple cubain dans les premiers mois du nouveau régime castriste, le Che fonde non seulement l’ICAIC (Institut cubain des arts et de l’industrie cinématographiques), mais également la nouvelle agence de presse cubaine, Prensa Latina, et la Televisión Revolución.

Première bataille médiatique contre l’Occident

Il pensait que la révolution avait besoin d’avoir ses propres médias, rappelle Jon Lee Anderson, «débarrassés des intérêts corporatistes, occidentaux et bourgeois.» Avec Fidel, «ils étaient très conscients que la télévision était le nouveau médium et qu’elle avait vraiment le pouvoir de changer les choses».

Le Che commence sa première bataille médiatique contre l’ennemi nord-américain. Nommé Procureur suprême des tribunaux révolutionnaires de la prison de la Cabaña, il ouvre les procès aux caméras, mais est rapidement montré du doigt par les médias occidentaux comme un tortionnaire, un bourreau… «Rien de tout ça n’est vrai», précise Jon Lee Anderson.

Le Che répond par la publication des exactions sous le régime de Batista et la liste des condamnés à mort, artisans de la dictature qui a coûté la vie à 20 000 personnes. Après une tentative de grande opération médiatique pour couper court aux critiques, Fidel met fin aux procès. Ernesto Guevara est nommé président de la Banque nationale de Cuba. L’homme détonne par son style et tous les attributs qui l’immortaliseront — tenue militaire, béret noir, cigare à la bouche, cheveux tombants et barbe longue.

Naissance d’un mythe

Une nouvelle époque commence pour lui à la fin de 1964, après son discours à l’ONU, où il est «à l’apogée de son autorité publique». L’historien cubain Julio César Guanche évoque la transformation, alors, du Che, «non seulement en grand dirigeant de la révolution, mais aussi en un leader global». Il entreprend un grand voyage pour apporter le soutien de Cuba à tous les pays d’Amérique latine, d’Asie du Sud-Est ou d’Afrique sur le chemin de la révolution socialiste. L’Algérie nouvellement indépendante verra sa dernière apparition publique. 

Lorsque, le 9 octobre 1967, il est exécuté par les forces de police boliviennes, son corps est exposé aux photographes pour mettre fin à l’image du héros, mais le Che, qui a retrouvé son aspect naturel au cours des derniers mois de guérilla, incarne déjà, pour certains, une figure christique. Le mythe est en marche…

Le documentaire «Che Guevara, naissance d’un mythe» est diffusé ce dimanche 1er décembre à 22h20 sur France 5.

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