Hakima Darhmouch : «L’année 2015 était un cauchemar !» (interview)

Hakima Darhmouch : «L’année 2015 était un cauchemar !» (interview)
Pierre Bertinchamps Journaliste

Ce mardi à 19h45, place au deuxième volet de la rétrospective de RTL-TVI. Après «De Charlie au Bataclan» la semaine dernière, Hakima Darhmouch revient sur le reste de l’actualité qui a aussi marqué 2015.

Cela va sans le dire : 2015 a été une année très difficile en matière d’information, et plus rien ne sera sans doute jamais comme avant. Reine de l’info sur RTL-TVI, Hakima Darhmouch raconte son ressenti sur cette période noire de l’actualité.

C’est devenu une tradition pour vous de présenter la «Rétro 2015»…

Les années précédentes, j’étais à l’œuvre pour la fabrication de toute l’émission, que ce soit dans le choix des images, le découpage et l’écriture de l’ensemble du déroulement. Pour 2015, en raison de la charge de travail tant pour Michel De Maegd que pour moi, ceux qui ont tous les mérites, ce sont Chantal Monet et Emmanuel Dupond. Dans cette deuxième partie, on reviendra sur la crise des migrants, le nucléaire, les Diables Rouges, la Grèce, Stromae et son année de fou, la COP 21,…

Une année d’info en 52 minutes, comment faites-vous vos choix ?

C’est terrible, et c’est même un casse-tête devant le flot d’images en stock. On y passe des heures et des heures, au point que parfois, nous n’avons plus de recul sur l’actualité. Il y a des images qui nous paraissent évidentes comme le petit Aylan. C’est cette image qui va symboliser la crise des migrants. Ou les tentes au Parc Maximilien. Ce sont des évidences. On les a tous en mémoire, et donc on va directement les rechercher.

Ce sera moins belge ?

Jusqu’à la dernière minute, on s’est donné le temps de savoir comment on découperait les choses. Habituellement, on fait une année belge et une année internationale. En 2015, il fallait consacrer une rétrospective au terrorisme. On a commencé l’année par le drame de Charlie Hebdo et on la termine sur les attentats de Paris. Les conséquences chez nous sont importantes. Ça méritait une rétro en tant que telle. Il nous restait la deuxième partie, et on n’a pas voulu ne rester que dans l’actualité nationale. Il s’est passé plein de choses intéressantes tant en Europe que dans le monde. On a fait un gros exercice de synthèse. Et bizarrement, dans l’actualité belge, ressortent pas mal d’événements plutôt positifs aussi.

Et pourquoi pas une rétrospective de l’actualité «positive» ?

On va y penser ! Pourquoi pas pour 2016… La question doit aussi se poser au quotidien dans le format «RTL Info». On essaie de le faire, mais on est souvent rattrapé par l’actualité. De plus en plus, et j’entends des familles autour de moi (souvent avec enfants), qui demandent que l’on mette en lumière des événements fédérateurs et positifs. C’est une idée à creuser. Je vais la vendre à Stéphane Rosenblatt… (rires)

Pensez-vous qu’avec les attentats qui se produisent depuis près de 15 ans, nous entrons dans une nouvelle ère de l’Histoire ?

Incontestablement, on écrit une nouvelle page de l’Histoire. Je ne suis pas experte ni historienne, mais j’observe. Dans le même temps, la radicalisation, le djihadisme et l’islamisme dans une certaine partie du monde existaient avant les attentats du 11 septembre 2001. D’ailleurs le film dans lequel joue François DamiensLes Cowboys», NDLR) le montre très bien. Les premiers cas de radicalisation remontent au début des années nonante. Effectivement, il y a un basculement dans nos rapports Occident/Orient… Mais chaque année est ponctuée de crise. On a connu aussi un cycle avec la crise financière et bancaire. C’est quelque part aussi un tournant dans l’histoire de l’Europe. Et le contexte a fait que la politique au sein de l’UE s’est modifiée, par une «droitisation». Il y a plusieurs pages de l’Histoire qui s’ouvrent depuis une vingtaine d’années. J’espère que la résultante sera pour aller vers un mieux. 

Pour vous, professionnellement, 2015 a été difficile ?

Franchement, c’était un cauchemar ! On a commencé dans la déprime avec des caricaturistes, des journalistes et des anonymes qui ont perdu la vie injustement avec Charlie Hebdo. Et l’année s’achève sur la barbarie à Paris… La tristesse passée, je me retrouve dans une phase de colère et de questionnement. Que va-t-il se passer ? Comment les médias et les journalistes vont pouvoir bien faire leur travail dorénavant ?

Quand on a dit que les médias en ont fait un peu trop, vous êtes d’accord ?

Non, en même temps, il y a une réelle demande. Un exemple : quand vous avez une communication politique comme celle que l’on a connue pour le fameux «Niveau 4», avec des parents qui ont besoin de savoir s’ils peuvent déposer leurs enfants à l’école en Région bruxelloise… On ne les a prévenus qu’à 19h30 ! On fait notre boulot, et la demande de s’informer est là. Après, on doit se remettre en question en permanence et garder une bonne dose de déontologie en tête, et éviter de faire la course à l’audience dans ces circonstances-là, ou de chercher la meilleure image et respecter la sécurité des citoyens. On l’a fait que ce soit nous, la RTBF ou la presse écrite au moment des enquêtes (la nuit du «lolcats», NDLR). Je trouve que l’on s’est remis en question pour bien faire notre job. Mais il y a sans doute toujours des choses à améliorer.

Le métier de journaliste a changé en 2015 ?

Plus que jamais. Et la responsabilité d’un mot ou d’une image, dans un contexte difficile et anxiogène, est encore plus importante. J’en suis encore plus parano. (rires)

Qu’espérez-vous pour 2016 ?

De la sérénité et du débat concret. J’attends de la classe politique plus de hauteur, avec des discours qui rassemblent les citoyens plutôt que les diviser.

Entretien : Pierre Bertinchamps

«Rétro 2015» (partie 2), ce mardi 29 décembre à 19h45 sur RTL-TVI

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