Luxe français : un empire bâti sur des savoir-faire étrangers !

Reconstitution d'un salon à la française du XVIIIe siècle © Arte

Ce samedi soir, à 20h50 sur Arte, le documentaire «L’Invention du luxe à la française» révèle pourquoi et comment la France est devenue la référence de l’industrie du haut de gamme.

Chanel, Dior, Hermès, Cartier, Vuitton, Moët & Chandon… La France est le premier exportateur mondial de produits de luxe. Avant ces grandes enseignes, il y eut la dentelle d’Alençon, les soieries de Lyon, la porcelaine de Sèvres ou le cristal de Baccarat. Pourquoi la France s’est-elle fait une spécialité de cette somptueuse industrie ? Pour renflouer les caisses de l’État ! Une étonnante histoire à découvrir samedi sur Arte.

Un pays agricole

Lorsque débute vraiment le règne de Louis XIV, en 1661, la France sort d’un siècle de guerre. Le pays est exsangue. Nommé intendant des finances, Jean-Baptiste Colbert reçoit pour mission de relever l’économie française. Par où commencer ? Le ministre constate que le pays dilapide ses richesses en important deux fois plus qu’il n’exporte. L’Hexagone est un pays agricole, il ne produit pas ces objets luxuriants dont la noblesse raffole. La porcelaine de Chine, les tapisseries de Flandre, le drap d’Angleterre, les soieries d’Italie… La France n’a ni les outils ni le savoir-faire. Pour changer la donne, Colbert lance la création de manufactures pour y faire venir les meilleurs ouvriers étrangers.

De Murano à Versailles

De tous les biens ostentatoires, le plus en vogue est le miroir. Les riches familles françaises se fournissent à Venise, sans s’inquiéter de débourser le prix d’un petit château pour acquérir une glace en pied. Les secrets des artisans verriers vénitiens sont bien gardés. C’est l’une des raisons qui amène les autorités à installer leurs ateliers sur l’île de Murano. À défaut de pouvoir les espionner, Colbert charge son ambassadeur de les débaucher. Les conditions sont si faramineuses que quelques artisans cèdent et rejoignent la France avec leurs secrets. Ainsi, en 1665, Colbert fonde la Manufacture royale de Glaces, dont descend aujourd’hui Saint-Gobain. Quelques années plus tard, c’est elle qui réalisera la fameuse Galerie des Glaces du château de Versailles. En cette même année, Colbert débauche un drapier originaire de Courtrai, qui déménage vers Abbeville avec ouvriers et machines. Pour la porcelaine, les choses sont plus compliquées car le territoire chinois est fermé aux étrangers. Seuls quelques missionnaires peuvent y pénétrer. C’est donc à un jésuite qu’est confiée la mission d’espionner pour percer les secrets des céramiques de Chine…

60 milliards d’euros

À la mort de Louis XIV, en 1715, toute une série de grandes manufactures ont ainsi vu le jour, qui tentent d’imiter les plus beaux produits étrangers. Louis XV poursuit le travail en suscitant les innovations. Grâce au travail des chimistes, par exemple, l’industrie du pays crée de nouvelles palettes de couleurs qui enrichissent tant les porcelaines que les textiles. Et sous le règne de Louis XVI, tout cela s’impose à travers le monde comme l’art de vivre à la française… Aujourd’hui, les 83 marques du luxe en France sont réunies au sein du Comité Colbert. Ensemble, elles réalisent chaque année près de 60 milliards d’euros de chiffre d’affaires !

Extrait d’un article paru dans Télépro du 03/12/2020

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