Vincenzo Ciuro : «On reconstruit la crédibilité de RTLsport»

Vincenzo Ciuro a débarqué l'été dernier à RTL Belgium pour prendre les commandes du service des sports © RTL Belgium/Olivier Pirard
Pierre Bertinchamps Journaliste

Chaque soir aux alentours de 22h pendant la Coupe du Monde, le nouveau patron des sports de RTL est aux commandes, avec Anne Ruwet, du talk «Dans le vestiaire» sur RTLplay et Club RTL.

Quel est le concept de «Dans le vestiaire» ?

La promesse, c’est d’avoir un talk où on a des prises de position, du débat et où on laisse la parole aux intervenants. On veut aussi avoir une tonalité différente de ce qui se fait à la RTBF, parce nous n’avons pas les images mais on veut tout de même aborder la Coupe du Monde. C’est un challenge difficile. Il y a eu une vraie réflexion pour savoir si on se lançait ou pas. Depuis mon arrivée, on s’est pas mal positionné sur le digital. On montre qu’on a de l’expertise et on reconstruit la crédibilité de RTLsport.

C’est un «Touche pas à mon poste» du foot ?

(Rires) Je n’irai pas jusque-là. Le but n’est pas de faire du buzz, du bad buzz ou du trash. On a sur le plateau des experts dans leur domaine, c’est-à-dire le foot. On veut amener du débat et un ton libre. Je n’accepte pas tous les débordements, mais j’accepte les prises de position quand elles sont faites dans le respect des autres. Ce qu’on ne veut pas faire, dans l’émission, c’est ronronner. J’ai envie que ce soit punchy et dynamique.

Vous voulez faire de l’anti-RTBF ?

Non. On veut proposer autre chose, et que cette différence soit marquée par apport à ce qu’on voit ailleurs. On veut apporter du talk et du débat à la française qui sont véritablement implantés dans la culture footballistique et sportive en général. Pourquoi ne pas le tenter en Belgique francophone ? Je n’ai pas envie de tomber dans le piège de la polémique et du buzz. Ça ne me correspond pas du tout et ce n’est pas dans la ligne éditoriale que l’on veut donner. Le plus difficile était de trouver le bon équilibre sur les premières émissions. Et là, le défi est relevé.  

Comment tenir 45 minutes sans avoir aucune image à montrer ?

On y arrive grâce à plusieurs paramètres. Tout d’abord, un bon casting. Il est fort et réussi avec Marc Delire en tête d’affiche. Qu’on l’aime ou pas, c’est un pro, un vrai passionné et bosseur. Il est vrai et il va amener du débat. Autour de lui, il a Silvio Proto ou Thomas Chatel qui sont les vrais experts du foot et qui n’ont pas non plus peur de dire ce qu’ils pensent. Et puis, il y a les invités tant du foot que d’autres milieux. Ce que je ne veux pas, c’est un plateau où les gens parlent entre eux, et ne laissent pas les autres intervenir. Et on a aussi des chroniques, mais les chroniques en images et les duplex avec le Qatar, ça ne prend que 7 ou 8 minutes sur toute la durée du programme. On veut vraiment que ce soit le plateau qui vive.

Il faut aussi le canaliser un peu, Marc Delire…

La polémique sur le brassard «Love», ça lui tient à cœur. Il l’a exprimé de manière expansive et forte visuellement et dans les mots. Ça le touche au plus profond de sa chair, et je n’ai pas envie de le censurer sur ça. Je ne lui ai jamais demandé de faire du trash. Marc Delire, c’est Marc Delire… Il faut parfois le cadrer, et il sait très bien que s’il va trop loin à un moment, je n’hésiterai pas. Le deal est clair aussi : il n’y a pas de limite à dépasser. Marc est un ami et on sait se parler de manière franche et honnête. Dans cet exercice-là, c’est le meilleur en Belgique francophone.

À ce rythme-là, que verra-t-on dans le 22e ou 23e numéro ?

On me pose souvent la question… Si vous regardez depuis le début de la Coupe du Monde, on a tellement de choses à dire que l’on doit faire des choix. Et je ne crois pas que ça va s’arrêter. Plus on monte en intensité, plus il y aura de l’enjeu dans les matches et des choses à raconter. Je n’ai pas peur…

Est-ce que «Dans le vestiaire» n’est pas trop plein de testostérone ?

On a une des meilleures journalistes sportives, c’est Anne Ruwet… La présence féminine est claire, précise, pointue, crédible et légitime. Elle a des journées interminables puisqu’elle intervient aussi dans les JT, donc elle ne peut pas venir tous les soirs. Mais elle va présenter un bon tiers des «Dans le vestiaires». Et par exemple pour les invitées, on a fait des demandes auprès des Red Flames, mais dans la sélection, il n’y a qu’une seule francophone… J’accepte la critique qu’il faut plus de diversité sur le plateau, mais le critère principal de la femme ou de l’homme reste la compétence.

L’idée est de lancer un talk sur le foot belge ?

Why not ?! On a la chance d’avoir sur RTL différents médias. Le champ des possibles est élevé. C’est un projet qu’il faut bien penser. Il faut là encore la bonne formule et le bon casting. Je ne veux pas lancer des projets pour lancer des projets et occuper la grille. Il faut une stratégie derrière. Mais, c’est certain qu’un talk hebdomadaire sur le sport manque sur Club RTL, et on a clairement la place.

Les audiences sont bonnes ?

Elles sont surprenantes ! En parts de marché, nous sommes au-dessus de la case de la chaîne. On est quasiment sur le double. À la base, c’est une émission digitale, et on profite d’une fenêtre télé, dans un cadre différé parce qu’on ne sait pas avoir une heure fixe sur Club RTL. Et surtout, il n’y a pas eu de promo autour de l’arrivée de «Dans le vestiaire» sur Club RTL (ndlr : les choses ne se sont décidées que la semaine avant la diffusion en télé, alors que les hebdos étaient déjà imprimés…).

RTL pourrait être candidat à acheter les droits de la Coupe du Monde ?

Pour l’instant, grâce à des accords passés au sein de l’UER, la RTBF est assurée d’avoir les droits de ces grosses compétitions jusqu’en 2028. Après on verra… Là, si on voulait se positionner sur un Euro ou un Mondial, on ne peut tout simplement pas le faire.

Selon vous, jusqu’où iront les Diables rouges ?

C’est tout ou rien ! Sans langue de bois, je les vois sortir en 1/8 de finale mais ils ont une position d’outsiders où pour la plupart des membres de l’équipe, ça risque d’être leur dernière possibilité d’aller chercher un trophée. Ils n’ont rien à perdre. S’ils se lâchent et qu’ils prennent du plaisir, on pourrait être surpris.

Entretien : Pierre Bertinchamps

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