Julio Iglesias : crooner latino, protégé de Franco

À 79 ans, Julio chante toujours dans la même posture : tête haute et main sur le ventre... © Isopix

Julio Iglesias aura 80 ans en 2023. Son charme de latin lover et ses ballades romantiques ont fait oublier que sa carrière a démarré dans l’Espagne franquiste.

Il a vendu 300 millions d’albums, a écoulé plus de disques que les Beatles au Japon ou Michael Jackson au Brésil et a reçu plus de 2.500 disques d’or et de platine ! Julio Iglesias (79 ans) est le chanteur de tous les records.

Mercredi à 22h50, Arte revient sur son parcours avec un documentaire intitulé «Julio Iglesias – Amour, gloire et chansons», qui rappelle qu’il doit le démarrage de sa carrière à… la bienveillance du régime de Franco.

Des rêves fracassés

Julio Iglesias naît en 1943 dans une famille madrilène, bourgeoise, catholique et franquiste. Comme plusieurs de ses proches avant lui, il se destine à la diplomatie. Il étudie donc le droit, tout en jouant au football au Real Madrid. Gardien de but de l’équipe jeune à 14 ans, il intègre l’équipe réserve à 18 ans.

Mais un soir de septembre 1962, sa voiture fait une sortie de route. Julio a 19ans. Sa colonne vertébrale est touchée. Les médecins pensent qu’il ne pourra plus marcher. Le jeune homme est contraint d’arrêter ses études et sait qu’il ne remontera jamais sur un terrain. Mais il est décidé remarcher. La convalescence est longue. Un jour, par hasard, un infirmier lui apporte une guitare…

Ambassadeur de la dictature

Le jeune Iglesias n’a jamais eu d’intérêt pour la musique mais, confiné en revalidation, il se découvre une passion pour la chanson. En 1968, remis sur pied, il s’inscrit au Festival de la chanson espagnole de Benidorm, le concours le plus prestigieux du pays. Et il gagne !

L’année suivante, il chante au Festival de San Remo. En 1970, il représente l’Espagne à l’Eurovision. Ce parcours fulgurant aurait-il été possible si son père n’était pas en bon terme avec le régime ?

La dictature de Franco vit ses dernières années, elle cherche à attirer les touristes et les capitaux. Ce jeune homme ferait un merveilleux ambassadeur pour le pays. Il a un charme fou, ses textes ne prêtent pas à polémique… Le régime l’autorise donc à voyager.

Vous, les femmes

Partout où il se produit, Julio dit et redit sa fierté d’être espagnol. La presse le juge mièvre et ringard, mais le public l’adore. Les femmes le trouvent sensuel, chantant les yeux fermés et la main sur le ventre. En réalité, par ces gestes, Julio tente de retrouver l’équilibre perdu depuis son accident. En France, l’album «À vous les femmes» le hisse au sommet, en 1979. On y trouve notamment «Je n’ai pas changé» et «Pauvres diables». CBS signe avec lui le plus gros contrat jamais conclu par une compagnie américaine avec un chanteur étranger. Julio Iglesias est une star planétaire.

Mourir en chantant

En Espagne, la transition démocratique n’est pas simple. Le 29 décembre 1981, le père de Julio est enlevé par les indépendantistes basques de l’ETA. Il sera libéré sain et sauf, mais le chanteur et sa famille s’exilent à Miami.

Iglesias se concentre alors sur sa carrière américaine, rivalisant parfois avec son fils Enrique. Il reprend aussi les études pour décrocher son diplôme de droit international privé à l’âge de 57 ans. Mais il l’assure : «Je mourrai en chantant.»

Cet article est paru dans le Télépro du 15/12/2022

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