Olivier Gourmet : «J’aime les silences qui parlent !»

Olivier Gourmet © Arte/Alexandra Fleurantin

Dans la minisérie «De grâce», à voir ce jeudi à 20h55 sur Arte, l’acteur belge (60 ans) incarne avec brio Pierre Leprieur, un docker taiseux du Havre, dont les secrets vont être révélés par les drames professionnels et familiaux.

Avant le tournage, connaissiez-vous l’univers des dockers ?

Uniquement à travers les actualités dont celles du port d’Anvers, point névralgique en Europe pour le trafic de drogue. Concernant le Havre, j’ai découvert la force du syndicat des dockers, très solidaires. Ils ont refusé que l’on tourne avec eux. Pourtant, le scénario parle de leur combat. Le réalisateur Vincent Maël Cardona espère qu’ils finiront par regarder la série.

Votre personnage est-il le patriarche de tout cet univers ?

Oui, il a de l’expérience, des valeurs. Mais est aussi pris dans une course à la rédemption pour endiguer le fléau de la drogue, car la violence menace ses homologues et aussi sa propre famille.

C’est à la fois un polar, une tragédie, un drame sur la transmission parentale et une quête de reconnaissance des jeunes générations. Y a-t-il une facette qui prédomine ?

Le metteur en scène voulait avant tout une tragédie afin d’explorer l’humain. Moi, j’ai été conquis par la singularité de ses choix et de la structure de la série. Il y a même une dimension mystique sur la fatalité, qui vous rattrape et peut vous submerger.

Vous faites aussi la voix off, à l’instar d’André Dussollier («Amélie Poulain») et Jean-Pierre Darras («La Gloire de mon père»). Un bel exercice ?

C’est particulier, il faut se laisser guider par les oreilles du réalisateur et du mixeur afin de moduler les intonations, beaucoup retravailler certains passages. La voix est importante, elle amène un plus aux images, un éclairage qui désamorce ou surprend.

Vous jouez souvent dans des fictions sur les tensions au travail («Rouge», «Ceux qui travaillent»)…

Je suis très touché par le social, tout ce qui est proche de la réalité des êtres humains auxquels je peux m’identifier. J’ai plus de plaisir à incarner ces rôles que des héros plus caricaturaux.

Les films aux nombreux silences vous conviennent-ils aussi davantage ?

Je ne suis pas un bavard ! Je viens de refuser une pièce de théâtre où ça parle trop, où il n’y a pas assez de silences pour prendre du recul ! Le silence et la présence corporelle sont nécessaires à la respiration et à l’intensité du personnage. Les mots expliquent, les silences ouvrent l’imaginaire du spectateur.

Ces derniers temps, on vous voit plus dans les séries. Y avez-vous pris goût ?

On m’en propose davantage. Et j’en regarde avec mon épouse sur les plateformes. Pour «Sambre», j’ai été agréablement surpris que France 2 propose une série d’une telle exigence.

Accepteriez-vous d’être le héros d’une série récurrente, tel «Maigret», l’un de vos héros préférés ?

Pourquoi pas… J’aurais juste peur d’être rattaché à une seule figure, comme Peter Falk avec «Columbo». Mais à mon âge, ce serait faisable, on ne m’étiquetterait plus ! Dans mes projets imminents, il y a une série Netflix, une fiction d’époque assez en phase avec la nôtre, elle parle de radicalisme religieux et de crainte de fin du monde. Et je tournerai aussi pour le cinéma «Le Radeau de la méduse» dirigé par le britannique Peter Webber.

Cet article est paru dans le Télépro du 1/2/2024

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