Le béton, une bien plus longue histoire qu’on ne le pense !

Près de deux mille ans plus tard, l’incroyable coupole du Panthéon romain défie l’usure du temps ! © Getty Images

Samedi à 22h30, Arte entame une série documentaire qui ne laissera pas de marbre, intitulée «Matériaux d’hier et de demain». Le premier épisode est consacré au béton !

En parcourant nos villes et nos campagnes, en contemplant ou en abhorrant les immeubles rectilignes hérités d’une époque entièrement dédiée au béton, on pourrait croire que ce matériau est une invention des temps modernes. Que nenni !

Depuis les pharaons

L’utilisation du béton remonte déjà à l’Égypte ancienne qui en avait fait un élément important de sa stratégie en l’introduisant dans la construction de ses temples et de ses premières fortifications. Mélange de chaux, d’argile, de sable et d’eau, il se trouve déjà sous forme de ciment dans la pyramide d’Abou Rawash érigée vers -2600. Les Égyptiens sont imités par les Phéniciens qui érigent la fabrication du béton en secret d’État. Alexandre le Grand l’apprécie tellement qu’il exporte son savoir-faire dans les colonies grecques annexées lors de ses nombreuses conquêtes.

L’Empire romain ne le dédaigne pas. Au contraire, la meilleure preuve encore bien visible, et par ailleurs intacte, est le Panthéon, bâti au cœur de Rome. Vitruve, le grand architecte de cette époque, loue l’utilisation bénéfique du béton qui, allié au sable volcanique de Pouzzoles, en fait un liant particulièrement résistant à la forte humidité.

Il est à noter que certains chercheurs attribuent dorénavant au savoir-faire romain de grandes vertus écologiques puisqu’il réduit considérablement l’empreinte carbone du béton évalué aujourd’hui à 8 % des émissions mondiales. D’ailleurs, certains ciments actuels font encore référence à la méthode romaine en leur attribuant l’appellation «pouzzolane».

Les Temps Modernes

Il faut ensuite remonter au XVIIIe siècle pour avoir de nouvelles connaissances sur le béton, notamment grâce à l’ingénieur anglais John Smeaton. Il relève l’importance de l’argile dans l’hydraulicité de certains calcaires, autrement dit la capacité de la chaux à faire prise dans l’eau. Quelques années plus tard, alors qu’un savant français établit que les pouzzolanes françaises affichent les mêmes qualités que les italiennes, un pasteur anglican découvre les grandes propriétés des roches naturelles qu’il étudie sur l’Île de Sheppey. Ses études marquent le départ historique de l’industrie du ciment naturel.

Louis Vicat, ingénieur français formé à la dure École nationale des Ponts et Chaussées, peut revendiquer la fabrication du premier ciment artificiel à travers des chaux hydrauliques dont il détermine avec précision le dosage et les composants. Étonnamment, il ne dépose pas le brevet, laissant ce soin, sous le nom de ciment de Portland, à un industriel, Joseph Aspdin, qui en retire alors tous les bénéfices financiers. Mais c’est Vicat aidé de son fils qui construit le pont du Jardin des plantes à Grenoble, première construction au monde totalement en béton.

Enfin en 1908, Jules Bied fait la découverte majeure du ciment fondu à base de calcaire et de bauxite. Cet ingénieur n’est ni plus, ni moins le directeur de la société Pavin de… Lafarge, aujourd’hui multinationale française aux nombreuses ramifications. Autre étape dans l’évolution de ce matériau, celle du béton armé, c’est-à-dire coulé dans des armatures métalliques. Les premières applications sont relevées en Angleterre et aux États-Unis avant de conquérir la France et l’Allemagne.

Revers de la médaille

La fabrication du béton est responsable d’importantes émissions de gaz à effet de serre et est catastrophique pour les milieux naturels, notamment par le prélèvement d’importantes quantités de sable détruisant les écosystèmes de nombreuses plages. La solution viendra sans doute du béton de terre qui se ramasse en abondance sans destructions notables. Il devrait pouvoir assurer l’autosuffisance de certains pays, trop souvent victimes de la mondialisation et des multinationales qu’elle génère.

Cet article est paru dans le Télépro du 22/6/2023

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