L’urbex : Indiana Jones près de chez soi

Les seules choses que les «urbexeurs» s’autorisent à rapporter de leurs expéditions sont des photos et des vidéos des lieux visités © Getty Images

Le petit-fils d’Indiana Jones aurait-il besoin du même attirail que son papy s’il se lançait dans le métier : le chapeau «Traveller», la veste en cuir et le fouet ? À voir…

De nos jours, la quête du Saint Graal a (partiellement) cédé la place à un autre type d’équipée que celle des «Indiana Jones». On appelle cela «urbex», acronyme d’«urban exploration», ou «exploration urbaine» en français. Moins exotique ? Pas sûr…

Un fameux Ninja

Il s’appelle Jeff Chapman. Mais dans le milieu de l’exploration urbaine, tout le monde connaît ce Canadien sous le pseudonyme de Ninjalicious. Il est considéré comme un des pionniers de cette activité dont il a contribué à populariser le nom. Comment ? Essentiellement via son fanzine Infiltration. Le sous-titre de celui-ci est éloquent : «Le (maga)zine sur les endroits où vous n’êtes pas censés aller.» Car c’est bien de cela qu’il s’agit. L’urbex consiste à visiter des lieux qui ont été laissés à l’abandon par l’homme ou qui sont interdits d’accès.

Un credo : pas de dégradations

Étudiant en philosophie, Ninjalicious commence par s’en donner à coeur joie à l’université de Toronto. Il se lance dans l’exploration des tunnels, toits et salles de service des bâtiments universitaires. Il élargit ensuite son rayon d’action à des hôpitaux, bâtiments abandonnés, hôtels, centres commerciaux, couloirs de service des métros… Jeff Chapman ne se contente pas de partager ses expériences personnelles. Il est aussi porteur d’un message éthique pour celles et ceux qui se lancent dans l’aventure. «Il encourageait le respect des lieux visités et la non-dégradation de leur état», rappelle le site Urbex Europe. «Son engagement a eu un impact durable sur la manière dont les explorateurs urbains abordent leur art.» Jeff Chapman est décédé d’un cancer en 2005. Il avait 31 ans.

Entrée interdite et code de conduite

Cet amour pour les lieux insolites (parcs d’attractions abandonnés, manoirs oubliés, usines désaffectées…), bien d’autres passionnés le partagent depuis lors, partout sur la planète. Le «code de conduite» qu’ils doivent (théoriquement) respecter comporte plusieurs points. Outre les éléments cités précédemment (endroits abandonnés, oubliés, cachés, interdits d’accès), l’exploration ne peut pas avoir de but lucratif, rien ne doit être forcé pour accéder au lieu. Pas question non plus de dégrader les bâtiments, d’emporter des objets qui s’y trouveraient ou même de divulguer sa localisation, pour éviter la venue de vandales, de squatters ou de pilleurs. Cela étant dit, sachez que la pratique de l’exploration urbaine, est une infraction ! Elle reste une violation de la propriété privée. Qui n’est pas non plus sans danger : la visite de ce type de lieux comporte des risques d’accidents. La «toiturophilie» (grimper sur les toits de cathédrales, d’églises ou d’immeubles) est particulièrement risquée (et illégale !). Des «urbexeurs» ont déjà trouvé la mort lors d’expéditions.

Secret… mais pas trop

En Belgique, de nombreux internautes se sont spécialisés dans l’urbex. Entre 200 et 300 spots seraient répertoriés. Mais chut ! Pas question de les divulguer. Enfin, si vous insistez… Plusieurs sites Internet, tout en déclinant toute responsabilité en cas d’accident lors d’une visite, donnent quelques tuyaux. En vrac : le château de Cendrillon se trouve près de Mons (commentaire : «Le milieu d’aprèsmidi me semble être le meilleur moment, en rapport avec la luminosité»), un orphelinat abandonné (commentaire : «On y entre comme dans un moulin»), la cheminée d’une ancienne centrale électrique (commentaire : «Avec le vent et la pluie, ça faisait de drôles de bruits. On se serait cru à Tchernobyl»). Pour le château de Wolfenstein (lui aussi abandonné), la localisation GPS est même disponible en ligne. Alors ? Avant de vous lancer dans l’aventure, souvenez- vous de cette réplique culte d’Indiana Jones : «On peut y aller. Il n’y a rien à craindre ici. C’est bien ce qui me fait peur…»

Cet article est paru dans le Télépro du 03/08/2023.

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