Qui a volé le sable du marchand ?

Image extraite du magazine «Sur le front» (France 5) © France 5/Winter Productions
Alice Kriescher Journaliste

Ce lundi à 21h sur France 5, le magazine «Sur le front» révèle un phénomène encore méconnu : la disparition du sable. Un élément pourtant essentiel, qui sert d’«airbag» entre la terre et la mer.

On ne le sait pas forcément lorsque l’on lézarde sur une plage de sable fin, et c’est pourtant une réalité, la pénurie guette cette matière que l’on tient, à tort, pour acquise tant elle semble infinie. Pourquoi le sable nous file-t-il entre les doigts et, surtout, quelles en seront les conséquences ? Réponses.

Présence millénaire

Alors que nous profitons allègrement des plages ensablées durant l’été, savons-nous d’où vient cette matière ? La constitution naturelle des plages remonte à des milliers d’années. «Le sable sur les plages actuelles a été mis en place il y a 3.000 à 4.000 ans», explique au quotidien Ouest France, David Menier, géologue marin au Laboratoire géosciences océan (LGO) à l’Université Bretagne Sud. «Les grains de sable peuvent être issus d’une désintégration de granit plus ancienne, qui peut remonter à des millions d’années, ou être des fragments de coquilles plus récents.»

Multicolore

Si nous le préférons blanc et fin, il existe au moins huit couleurs de sable : blanc, blond, noir, gris, brun, rouge, rose et vert. Des teintes liées aux minéraux qui le composent, comme le quartz ou le mica. Sa texture est aussi multiple et définie, entre autres, par son origine. «En Bretagne, le sable est issu de l’érosion locale des côtes de granit par exemple. L’eau, le gel, le vent érodent les côtes et de petits détritus de roches se retrouvent dans la mer», détaille-t-on dans le journal 20 Minutes. «Ce ne sera donc pas le même sable qu’en Normandie, où les côtes sont plus calcaires.»

Mafias du sable

Alors qu’il est avec nous depuis tant d’années, le sable est pourtant en voie de disparition. Et pour cause, c’est la deuxième ressource la plus exploitée par l’homme, après l’eau. Hors des plages, le sable nous a permis de construire notre civilisation moderne. Sans lui, pas d’asphalte, de verre ou de béton. Chaque année, ce sont entre 40 à 50 milliards de tonnes de sable qui sont extraites, en grande partie pour les besoins de la construction. Une demande qui dépasse aujourd’hui largement les capacités de production naturelle. «

Ce chiffre a doublé en dix ans et représente le double de ce que sont capables de produire tous les fleuves et rivières de la planète en sédiments», explique au Soir Éric Chaumillon, géologue à l’Université de La Rochelle. La ressource est à ce point prisée que des «mafias du sable» se sont développées, notamment en Inde. Entre 2000 et 2013, dix millions de tonnes de sable auraient ainsi été exploitées illégalement pour être exportées vers l’Europe, entre autres.

Sables mouvants

Dans cette guerre du sable le grand perdant est, comme souvent, l’environnement. «Sous l’effet du dragage, les animaux sous-marins sont aspirés en même temps que le sable. Or, ces formes de vie sont l’essence de la chaîne alimentaire puisque les plus gros poissons se nourrissent des petits», résume Éric Chaumillon. Face à cette disparition, outre la faune et la flore marines, c’est une partie de l’humanité qui risque de devoir survivre dans des conditions pénibles. Par exemple, l’archipel des Maldives, qui a d’ores et déjà perdu une centaine de petites îles, devrait totalement disparaître en 2100 ! 

Cet article est paru dans le Télépro du 22/6/2023

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