Rollon, le Viking devenu normand

À l’origine de la lignées des ducs de Normandie, Rollon ne porta pourtant jamais ce titre Getty Images La conversion de Rollon au christianisme faisait partie du marché passé avec Charles III © RTBF/Keren Productions

Au Xe siècle, un guerrier scandinave va convaincre le roi des Francs de lui céder ce qui deviendra la Normandie. Ce vendredi à 22h45 sur La Une, «Le Temps d’une histoire» évoque le parcours de Rollon.

Mais qu’est-ce qui a bien pu pousser les Vikings à piller l’Europe occidentale, en allant même jusqu’aux côtes africaines et plus loin encore, jusqu’à Terre- Neuve ? Simple appât du gain ? Aussitôt leurs méfaits accomplis, ils regagnent leurs foyers à une vitesse d’ailleurs étonnante tant leurs navires sont bien profilés, non sans exiger le fameux Danegeld, le tribut à payer pour ne pas les voir revenir tout détruire. Mais pas seulement, car derrière ces farouches guerriers sans foi, sauf l’adoration qu’ils vouent à leurs dieux Thor et Odin, se cachent aussi de paisibles éleveurs, des artisans habiles, des marchands et même des poètes accomplis, comme le traduisent si bien les sagas.

S’établir définitivement ?

Il y a aussi le climat rude qui autorise bien peu de cultures, poussant ainsi les paysans à trouver de nouvelles terres aux températures plus accueillantes. Qu’ils soient norvégiens, danois ou suédois, les Vikings, étymologiquement «les pirates qui fréquentent les baies», vont prendre petit à petit pied loin de chez eux en se sédentarisant, comme en Angleterre, grâce à un accord trouvé avec son roi, Alfred, le premier à les avoir vaincus, puis en France. Quant aux Suédois, les voilà devenus les Varègues, installés en Ukraine actuelle. Parmi tous ces chefs guerriers, Rollon, né vers 846 mais dont on ne connaît pas l’origine exacte, norvégienne ou danoise. L’homme se livre à de multiples raids sur les côtes de la Frise et de la Manche. Et il en impose avec ses 2 m et ses 140 kg, à tel point qu’aucun cheval ne peut le supporter et c’est à pied qu’il se déplace. En établissant son camp de base à l’embouchure de la Seine, il s’empare de Rouen, menace Paris et fait le siège de Chartres dont il ne parvient pas à s’emparer. C’est alors qu’il négocie avec le roi de la Francie occidentale, héritage du traité de Verdun de 843 et du partage de l’empire carolingien entre les trois petits-fils de Charlemagne.

Rollon devient Robert

Et Rollon de signer en 911 avec Charles III, dit le Simple, le traité de Saint-Clair-sur-Epte, qui lui octroie une partie de la Neustrie, correspondant grosso modo à la Haute-Normandie. En échange, Rollon s’engage à tenir tête à de nouvelles incursions vikings. Lui et ses hommes acceptent en outre de se convertir au christianisme. Après un apprentissage très rudimentaire du catéchisme, ils sont baptisés en 912 à la cathédrale de Rouen. Rollon francise son nom et devient Robert, nom emprunté à son parrain de baptême. Dorénavant, il s’exprime en latin et dans la langue des Francs. Mais il ne portera jamais le titre de duc de Normandie, mais bien celui de comte, dérivé de «Jarl» en langue scandinave. D’après le chroniqueur Adémar de Chabannes, la légende veut que sur le point de passer de vie à trépas, Rollon sacrifie une centaine de prisonniers aux dieux traditionnels scandinaves, tout en faisant don d’une somme très importante aux églises locales. On n’est jamais trop prévoyant !

Quel héritage ?

Devenu vassal de Charles III, Rollon épouse Gisèle, la fille naturelle du souverain. Celle-ci meurt très jeune, permettant à son veuf de mari de reprendre sa liaison avec sa concubine Poppa, une ancienne prisonnière chrétienne. Rollon meurt vers 930 et sa dépouille suivra toutes les vicissitudes de la cathédrale de Rouen où il est toujours enterré. Quant à son héritage, il est contenu dans une série d’appellations dont le nom même de la Normandie, le pays des hommes du Nord, dans celui de certains villages normands ainsi que dans des patronymes. Enfin, rappelons que Guillaume le Conquérant, un descendant de Rollon, deviendra roi d’Angleterre en 1066, après la bataille d’Hastings.

Cet article est paru dans le Télépro du 26/1/2023

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