Yanomami : plaidoyer pour des diamants verts !

Porte-parole emblématique des Amérindiens Yanomami, Davi Kopenawa sillonne le monde pour l’alerter des dangers liés aux dégâts irrémédiables causés à son peuple et à la forêt amazonienne © Getty Images

Les Yanomami, peuple de la forêt amazonienne composé de chasseurs-cueilleurs et d’agriculteurs vivant dans un décor-bijou, appellent à l’aide depuis des années. En vain.

La nature est une personne qui apporte la santé et le bonheur, la pluie et le vent, et c’est une très bonne chose. Nous veillons sur le poumon du monde qui est très important pour vous aussi. Vous, les non-Indiens, vous devez défendre notre forêt avec nous. Parce que c’est vital pour nous tous !», insiste Davi Kopenawa, chaman du peuple yanomami, surnommé le «dalaï-lama de la forêt», et porte-parole de la lutte des siens contre une colonisation dont les multiples dégâts sont incommensurables.

Les invasions barbares

Estimé à environ 37.000 personnes – selon l’une des plus récentes comptabilisations -, le peuple yanomami est connu du monde entier depuis les années 1950, date à laquelle des missionnaires l’ont rencontré pour la première fois. Vingt ans plus tard, sa douceur de vivre a définitivement pris fin à la suite d’invasions successives. De 1973 à 1975, des militaires ont détruit une importante partie du territoire en abusant de ses ressources, en tuant les récalcitrants et en amenant dans leur sillage des maladies dévastatrices dont la peste, la tuberculose, le paludisme et la rougeole. Ont aussi sévi des mineurs intéressés par le sous-sol de l’endroit, riche en minéraux. Et d’autres avides d’extraire de l’or.

Dans les années 1980, les survols d’avions clandestins transportant les butins auraient encore davantage endommagé faune et flore, réduisant ainsi la nourriture des Yanomami. «Ils ont perdu la tranquillité que leur offrait la jungle», explique à la BBC, Alcida Rita Ramos, professeur à l’Université de Brasilia.

Interagir avec la nature

L’activiste tribal Mauricio Yekuana, trésorier de l’Association Hutukara qui a mené une campagne internationale pour la protection de la terre yanomami, ajoute dans TheConduit.com : «L’afflux de mineurs illégaux décime la tribu. Le gouvernement a reconnu la terre yanomami comme territoire indigène en 1992, mais l’exploitation minière illégale se poursuit aujourd’hui.»

«Nous ne sommes ni des animaux, ni des sauvages. Je veux montrer l’image de mon peuple et aussi de la forêt, puisqu’elle est notre maison. C’est là où nous vivons et mangeons, où nous étudions les xapiri (esprits sacrés de la forêt tropicale, ndlr). Nous apprenons en interagissant avec la nature. Alors, pourquoi la détruire ?», déplore Davi. Il tente de se faire entendre par tous les moyens en interpellant l’Onu, en participant aux dernières COP et en participant à des reportages et films dont «The Last Forest» (2021) et «Holding up the Sky» (diffusé lundi sur La Trois).

Notre dernière forêt

Hélas, les dommages collatéraux privent aussi le peuple de ses traditions et de ses richesses d’apprentissage transmises de génération en génération, comme l’élevage de perroquets qui deviennent des animaux de compagnie, la pêche, la chasse ou la confection artisanale de barques. Les jeunes Yanomami risquent d’en être privés, poussés vers les villes et attirés par leurs technologies modernes. Luiz Bolognesi, réalisateur de «The Last Forest», souligne : «N’oublions pas que, pour ces adolescents, choisir d’aller dans le monde des Blancs équivaut souvent à vivre en situation de vulnérabilité !» S’ils migrent, que deviendra le magnifique poumon vert ? «Les gens doivent connaître l’énormité des problèmes auxquels nous sommes confrontés », conclut Davi. «Car nous sommes les vrais gardiens de la forêt.»

Cet article est paru dans le Télépro du 27/07/2023.

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