Chauve qui peut !

La calvitie touche 15 % des hommes de moins de 20 ans, 30 % des trentenaires, 40 % des quadras, 50 % des quinquas, pour atteindre 80 % des hommes de plus de 70 ans ! © France 5/Bangumi
Giuseppa Cosentino Journaliste

Longtemps moqués, les crânes dégarnis reprennent du poil de la bête. Ce vendredi à 21h, France 5 diffuse le documentaire «Chauves, la revanche».

La calvitie menace quatre hommes sur cinq. Autant dire que presque toutes les têtes masculines seront concernées un jour ou l’autre. Mais la perte des cheveux est-elle une fatalité ? Pire, la fin de la virilité ? Pas sûr, car depuis Bruce Willis, Dwayne «The Rock» Johnson, Vin Diesel ou Shemar Moore, les codes de la beauté masculine ont été bousculés. Vendredi soir, le documentaire diffusé sur France 5 retrace le combat mené par de séduisants crânes courageux qui ont fait fi des préjugés profondément enracinés. Un récit qui sonne comme une revanche dans une société qui ne les a pas toujours acceptés… Voyage au pays des têtes dégarnies.

Génétiquement programmé

Si la plupart des hommes voient leur chevelure se réduire comme peau de chagrin au fil des ans, c’est dû à un excès d’hormones mâles qui accélèrent le cycle de vie des cheveux et donc… leur chute. Mauvaise nouvelle : ce dérèglement est héréditaire. En matière d’injustice capillaire, les idées reçues ont la peau dure. Longtemps, les mères ont été accusées de transmettre les gènes fatidiques. Études à l’appui ! Mais, inutile de scruter le ciboulot de votre grand-père maternel pour y lire l’avenir de votre crinière, d’autres facteurs entrent en ligne de compte. Sans parler du stress, de l’alimentation, de certains médicaments ou maladies susceptibles d’interférer dans la bataille du cheveu. Une loterie génétique pas toujours facile à accepter…

Un poil complexé

La perte des cheveux impose en effet une nouvelle image de soi… pétrie de peurs : celle de vieillir, de perdre sa virilité ou de ne plus séduire. «La calvitie masculine ne dérange pas la plupart des femmes. Mais rares sont celles qui voudraient à tout prix d’un chauve comme amoureux», constate Jean-Benoît Nadeau dans sa chronique consacrée aux tignasses désargentées. Si certaines célébrités ont fait leur «coming out», à l’instar de Yul Brynner (Ramsès II dans «Les Dix Commandements»), Jason Statham («Le Transporteur») ou Shemar Moore («S.W.A.T.»), d’autres n’ont jamais assumé leur calvitie précoce, tels Elton John ou Franck Sinatra, qui emporta sa perruque dans la tombe…

Histoires tirées par les cheveux

La crainte de devenir chauve est millénaire. Les remèdes aussi… Ainsi, Hippocrate (460-377 av. J.-C.) – qui n’avait plus qu’une couronne de cheveux courant d’une oreille à l’autre -, en bon «père de la médecine», recommandait… la castration. Sans pour autant l’avoir testée lui-même. Dans l’Égypte ancienne, il était d’usage d’appliquer des graisses d’hippopotame, de crocodile, de chat, de serpent et d’ibex (sorte de bouquetin) pour contrer le fléau. Seuls les enfants royaux et les divinités infantiles étaient représentés le crâne rasé, avec une mèche unique sur le côté, en signe de leur haute appartenance. Mais dès la puberté, ils dissimulaient leurs chefs sous des perruques, très à la mode durant l’Antiquité. «En Égypte et à Rome, elles étaient utilisées comme des accessoires de séduction», indique la plateforme Herodote. com. «Même si César leur préférait la couronne de lauriers pour cacher sa calvitie…»

Coupe au symbole

Que celui qui n’a jamais eu honte de son caillou imberbe lui jette le premier peigne ! À l’instar de Samson, ce héros biblique d’une puissance extrême, qui terrassait tous ses ennemis. Jusqu’à ce qu’une femme nommée Dalila le prive de sa chevelure et lui ôte, dans le même temps, sa vigueur. Jésus lui-même a toujours porté les cheveux au vent dans l’art chrétien. «La chevelure comme symbole de force et de virilité, évoquant la crinière du lion, imprègne de nombreuses cultures. De même que le rasage a, de tout temps, été un signe de servitude», déclare le chirurgien Jean-Claude Dardour dans sa chronique «Calvitie et symbolique des cheveux chez l’homme». Ainsi, «depuis l’Antiquité, les esclaves étaient rasés. À l’époque mérovingienne, tondre un roi, c’était lui enlever sa puissance virile et son droit à régner». Les Amérindiens scalpaient leurs ennemis pour leur infliger «une dégradation suprême». Après la Seconde Guerre mondiale, les femmes qui avaient entretenu des relations avec les Allemands étaient tondues sur la place publique. Au Moyen Âge, les moines portaient la tonsure en signe de renoncement à la luxure et en gage d’humilité. Un sentiment inconnu du roi Louis XIV qui, honteux de son crâne déplumé à la suite d’une mauvaise fièvre contractée à l’âge de 20 ans, relança la mode des perruques les plus fastes et les plus… infestées de poux !

Sous contrôle

«En perdant ses cheveux malgré lui, l’homme perd aussi une partie du contrôle de son propre corps. Car l’alopécie ne se choisit pas», prévient Philosophie Magazine. Face à ce constat, certains décident de prendre les choses en main et optent pour la greffe. C’est le cas de Florent Pagny, Cyril Lignac, mais aussi de David Beckham ou Tom Hanks. D’autres choisissent de s’assumer, voire de devancer le temps en se rasant entièrement le crâne. Cette seconde option rendrait ses adeptes plus… attirants. Du moins, à en croire l’industrie du cinéma qui les cantonne à des rôles d’action : Bruce Willis, Dwayne Johnson ou Channing Tatum arborent aussi fièrement leur front glabre que leurs muscles saillants. Une façon de compenser leur absence de crinière ? Quel toupet !

Cet article est paru dans le Télépro du 9/3/2023

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici