L’horloge de l’apocalypse : minuit, l’heure du cataclysme

Image extraite du documentaire «L'Horloge de l'apocalypse, quelques secondes pour sauver le monde», à voir sur Arte © Arte
Stéphanie Breuer Journaliste

Imaginée par des scientifiques pour alerter des dangers pesant sur l’humanité, l’horloge de l’apocalypse n’a jamais été aussi proche de minuit. Un sujet évoqué dans la nuit de mardi à mercredi… à minuit sur Arte.

Tic-tac, tic-tac… 90 secondes ! C’est le temps – qui n’a jamais été aussi court – qu’il reste à l’humanité avant la fin du monde, selon l’horloge de l’apocalypse (Doomsday Clock en anglais). Créé par des scientifiques au début de la guerre froide, ce compte-à-rebours symbolique fait l’objet d’un documentaire mardi sur Arte. Explications. Depuis janvier 2023, l’horloge qui calcule symboliquement le temps qu’il reste avant l’effondrement de l’humanité affiche 23 h 58 et 30 secondes. La guerre en Ukraine et le réchauffement climatique qui s’accélère nous rapprochent un peu plus encore de l’heure fatidique. Minuit représentant l’apocalypse, plus l’heure avance, plus la fin du monde est imminente.

Création en 1947

La création de cette horloge virtuelle date de 1947. À l’époque, le monde est entré dans l’ère nucléaire. Deux ans plus tôt, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, des bombes atomiques ont été larguées sur Hiroshima et Nagasaki, et la guerre froide vient de débuter. À l’université de Chicago, des chercheurs s’inquiètent. Il s’agit des rédacteurs de la revue «Bulletin of the Atomic Scientists», fondée par Albert Einstein, Robert Oppenheimer et d’autres scientifiques. Ceux-là mêmes qui étaient engagés dans le «Projet Manhattan», à l’origine de la première bombe A, s’alarment des conséquences de leur invention ! Désireux d’informer sur les dangers pesant sur l’humanité, ils confient la conception visuelle de l’horloge à l’artiste Martyl Langsdorf qui, pour symboliser l’urgence, place l’aiguille arbitrairement sept minutes avant minuit.

Après le premier essai nucléaire des Soviétiques en 1949, la grande aiguille est avancée de quatre minutes. L’illustration, jusque-là statique, devient alors dynamique. Depuis cette date, l’horaire est réévalué chaque année. Au départ, il l’était par Eugene Rabinowitch, rédacteur en chef du Bulletin. Depuis sa mort en 1973, le conseil scientifique et de sécurité de l’ONG supervise la mise à jour. Il rassemble «des scientifiques et d’autres experts possédant une connaissance approfondie de la technologie nucléaire et de la science du climat», peut-on lire sur le site officiel. Ceux-ci consultent leurs collègues de diverses disciplines et sollicitent l’avis de lauréats du Prix Nobel.

Facteurs de risques

Longtemps, les fluctuations ont suivi les soubresauts de la guerre froide. Dans les années 1950, lorsque Soviétiques et Américains testent de nouvelles bombes thermonucléaires, l’apocalypse n’est plus qu’à deux minutes. L’horloge recule à 23 h 48 au moment de la détente entre les deux blocs dans les années 1970, avant de grimper à 23 h 57 lorsque Ronald Reagan relance la course aux armements dans les années 1980.

C’est en 1991 que l’horloge affiche l’heure la plus optimiste de son histoire : 23 h 43. En cause ? La signature du Traité de réduction des armes stratégiques et la fin de l’Union soviétique. Ainsi, la question nucléaire a longtemps été le seul critère pour fixer l’heure de cette horloge. Désormais, les tensions internationales sont prises en compte, de même que les risques de catastrophes climatiques, le terrorisme, les pandémies, la désinformation… Souvent critiquée pour son approche peu scientifique, l’horloge est aussi accusée de générer un climat de peur. Pour ses défenseurs, elle est avant tout un outil métaphorique, dont la fonction première est d’appeler à une prise de conscience collective.

Cet article est paru dans le Télépro du 16/11/2023

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