Vie privée … mais pas trop

Image extraite de «2030, vers la fin de la vie privée ?», à voir sur Tipik © RTBF

Vols de données sur le Net, géolocalisation, reconnaissance faciale…  : nos faits et gestes peuvent être suivis à la trace, «à l’insu de notre plein gré». Mardi à 20h30, Tipik diffuse l’émission «2030, vers la fin de la vie privée ?».

«La vie privée est la sphère d’intimité de la personne (…). Cette sphère a vocation à rester à l’abri des regards d’autrui». Voilà pour la définition donnée par la maison d’édition Dalloz, spécialisée dans le droit et l’actualité juridique. Le respect de la vie privée ? «Tout le monde a droit au respect de sa vie privée et familiale, sauf dans certains cas et aux conditions fixées par la loi», précise belgium.be, le portail Internet du gouvernement fédéral belge.

Étalage sur la Toile

La législation européenne va plus loin. Elle considère aussi le domicile et la correspondance comme privés. Bien, nous voilà donc blindés. En fait, pas vraiment… Grâce ou à cause des nouvelles technologies, les traces que nous laissons derrière nous sur la Toile sont multiples et variées. Dans le monde numérique, des pans entiers de notre vie privée deviennent accessibles à des personnes pas toujours bien intentionnées.

Menaces

Dans un premier temps, il faut reconnaître que «la sphère d’intimité de la personne» a eu tendance à se rétrécir ces dernières années. Sur les réseaux sociaux, on déballe bien des choses. Volontairement… ou pas. Photo du repas «grave bon» que je me paie, vacances «de sa mère» en Espagne… Selfie par-ci, duckface par-là. Ces fragments de vie privée peuvent en révéler plus qu’on ne l’imagine.

Images en HD

Le danger peut notamment venir des appareils photographiques numériques. Leurs images en haute définition sont d’une qualité exceptionnelle. À un point tel que leur netteté va permettre d’identifier des personnes non visées (mais dont l’image se reflète dans des verres de lunettes ou sur un plan d’eau), de lire le contenu d’un document confidentiel qui apparaît à l’arrière-plan. Le site Le Journal du Net va plus loin. Il évoque la possibilité de relever des empreintes digitales ou même de refaire une clé grâce à une photo. Ajoutons à cela les données GPS (et donc la géolocalisation) transmises avec les photos, les enregistrements dont la finesse permet de reconstituer un texte grâce aux sons du clavier : les exemples de dérives rendues possibles par les technologies nouvelles ne manquent pas.

Protections

En Belgique, le législateur a tenté de s’adapter aux évolutions technologiques. Depuis mai 2018, une loi établit la manière dont les personnes et les services doivent traiter vos données, le Règlement général sur la protection des données (RGPD). «Ce règlement apporte plus de transparence et de contrôle concernant vos données», précise le ministère de la Justice. La loi qui existait auparavant s’appelait «Loi vie privée». Concernant les caméras de surveillance, une loi spécifique a aussi vu le jour «pour protéger la vie privée du citoyen de manière optimale». Mark Zuckerberg, fondateur de Facebook, l’affirme : la vie en public est «la nouvelle norme commune».

Ligue des droits humains

«Les données personnelles de chaque Belge sont achetées ou vendues presque 300 fois par jour», affirme Laurent Mathieu dans le documentaire «2030, la fin de la vie privée ?» (mardi sur Tipik). «Comment, en Belgique, vivre avec le numérique sans mettre en péril son intimité ?», s’interroge le journaliste. La Ligue des droits humains suit le dossier de près. En février dernier, elle introduisait un recours contre la loi «data retention» devant la Cour constitutionnelle. Une loi qui prévoit l’obligation pour les opérateurs de donner les métadonnées de leurs utilisateurs à la justice «pour sauvegarder la sécurité nationale et lutter contre la criminalité grave». Selon la Ligue, cela «établit un déséquilibre entre cet objectif de sécurité et les violations des libertés individuelles».

Cet article est paru dans le Télépro du 7/12/2023

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