Gandhi, l’homme derrière le mythe

«Bapu» a fait de son propre corps et de son image les armes majeures d’une guerre de communication mondiale, en Inde, en Europe et jusqu’aux États-Unis © France 5

Des mausolées, des statues et des musées ont été érigés à son effigie… Il a influencé Nelson Mandela, Martin Luther King et le Dalaï-Lama. Mais qui était réellement Gandhi ? 

Mohandas Karamchand Gandhi est né le 2 octobre 1869 en Inde, alors sous domination britannique. À 19 ans, il quitte le nid familial pour étudier le droit en Angleterre. Diplômé, il rentre au pays pour y exercer son métier. En 1893, il accepte un contrat d’un an en Afrique du Sud, où il reste finalement deux décennies. Il défend les immigrants indiens en proie aux discriminations raciales des Blancs et développe sa doctrine, fondée sur la non-violence, la maîtrise de soi et le respect de la vérité : le satyagraha.

En 1913, il mène sa première action non-violente : «la marche des mineurs du Transvaal», se faisant ainsi connaître dans tout l’Empire britannique.

Mahatma

De retour sur sa terre natale en 1915, sa réputation d’ascète et de héros le précède. «Mahatma», la Grande âme, est né. Il prend la présidence du parti du Congrès et se consacre à plusieurs missions : mener son pays à l’indépendance, prôner l’autosuffisance économique et permettre l’émancipation des femmes et des Intouchables. Son image se forge durant ses années de lutte pacifiste.

Son crédo ? La désobéissance civile. Après de nombreuses négociations et le mouvement «Quit India», l’Empire des Indes devient indépendant le 15 août 1947. Son assassinat, l’année suivante, fait de lui un martyr et scelle son image d’icône spirituelle et politique, de Christ du XX e siècle.

Non-violence

Opposé à tout débordement violent, Gandhi a tissé son mythe au fil de ses grèves de la faim, de ses appels au boycott des marchandises étrangères, de ses arrestations, de ses emprisonnements et de ses manifestations non-violentes.

«La non-violence demande qu’on se soumette volontairement à la peine encourue pour ne pas avoir coopéré avec le mal», dira-t-il lors de son jugement en 1922 pour subversion. Dans l’imaginaire collectif, il reste ce petit homme frêle en pagne blanc et au nez surmonté de lunettes rondes, opposé à toute forme de violence, assis devant un rouet grâce auquel il confectionne ses propres vêtements, un exemple d’ascétisme et de chasteté.

Roi de la com’

Mais celui qu’on a surnommé «Bapu», le Père de la Nation indienne, n’a pas toujours plu à tout le monde. Déjà à l’époque, certains de ses proches reconnaissaient que derrière le petit moustachu souriant se cachait une opération de communication bien rôdée, dont Phil Mason dévoile les coulisses dans le livre «Les Testicules de Jeanne d’Arc… et autres surprises de l’Histoire» (Pocket). Ainsi, un de ses assistants déclarait à l’époque : «Il faut beaucoup d’argent pour maintenir Gandhi dans la pauvreté».

De la même manière, son image d’homme pur s’écorne lorsqu’on apprend qu’il «autorisait» des adolescentes de son ashram à dormir nues avec lui pour mettre son vœu de chasteté à l’épreuve.

Mahatma aurait également été impossible à vivre. Dictant les moindres mouvements de ses adeptes, il a déclaré lors d’un congrès national indien en 1920 : «À partir du moment où vous me choisissez comme leader, vous devez accepter la dictature et la discipline de la loi martiale.»

Aujourd’hui encore, certains remettent en cause l’aura de sainteté de Gandhi. En décembre 2018, une statue de lui est retirée de l’enceinte de l’Université du Ghana à Accra. Les enseignants accusent le leader de racisme envers les Africains noirs, citant des passages d’écrits où Gandhi les traitaient de «sauvages» et affirmait que les Indiens leur étaient «infiniment supérieurs».

Le documentaire «Gandhi, de l’homme à l’icône» est diffusé dimanche à 22h35 sur France 5.

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