Rencontre avec Patrick Bruel !

Rencontre avec Patrick Bruel !

Il n’avait plus sorti d’album personnel depuis 2006. Dans «Lequel de nous», le chanteur offre le portrait d’un homme de 53 ans, certes mélancolique, mais toujours en prise avec le monde.

«Mes enfants occupent 50 % de mon cerveau»

À peine sorti, le nouvel album de Patrick Bruel fait un carton («Lequel de nous», Sony Music). De quoi le rassurer ? «Je suis soulagé de voir que le public a encore envie de partager une nouvelle aventure avec moi. Je remets mon titre en jeu à chaque fois, j’en suis très conscient», confie ce «jeune papa» de deux enfants, Oscar (9 ans) et Léon (7 ans).

D’un album à l’autre, vos chansons privilégient trois thèmes : l’amour sous toutes ses formes (filial, charnel, de jeunesse…), l’amitié et l’actualité du monde. Elles se font écho entre elles. Par exemple, l’amitié avec «Place des grands hommes», sa suite «Ces moments-là» et «Gosses en cavale». Etes-vous d’accord ?

Absolument, elles peuvent se répondre. Il y a une résonnance entre elles, avec une manière différente de dire les choses. Pour l’amitié, on peut ajouter «On t’attendait», «Pour la vie» et je me suis aidé, ici, du texte de Musset sur l’amitié dans la tourmente. J’ai joué au piano à la manière de Chopin. Car j’ai toujours imaginé qu’ils auraient pu se rencontrer. Pour l’amour, il y a «Je te le dis quand même» et la nouvelle «Viens tout contre moi». Qui n’a pas rêvé d’une rupture un peu jolie, apaisée, en étant l’un contre l’autre ? On n’est pas obligé de se déchirer quand on se sépare. Mais cela relève beaucoup du fantasme ! Et «Tout change si vite» où l’homme est écoeuré que cela se passe si mal en amour, rappelle «Casser la voix».

Pour la nostalgie des amours de jeunesse, il y a eu «La Fille de l’aéroport» et ici «She’s Gone»…

Oui, pour «She’s Gone», je me suis souvenu d’un concert des Rolling Stones à Londres où j’ai croisé une fille, j’avais 17 ans. Il y a un côté très cinéma. Je crois que je ne sais écrire qu’ainsi.

C’est un album très varié : avec des cordes, de belles orchestrations, des titres plus jazzy et un hip hop !

Je mélange tous les styles. Le single «Lequel de nous» donne un signal, mais n’est pas la couleur de l’album.

«Les mômes ignorent les dangers»

Avec La Fouine, vous chantez «Les Maux d’enfants» sur les dérapages d’Internet pour les plus jeunes

Je m’adresse aux parents démissionnaires. Aucun parent n’est né avec un ordinateur. Je n’étais pas très bon il y a quatre ans sur Internet. En plus, je dirige un site de poker. Je m’y suis mis quand on a demandé à mon fils de 6 ans d’effectuer des recherches pour sa classe. J’ai réalisé qu’il était bon et surfait vite. Je ne voulais pas être dépassé. Du coup, je suis sur Facebook, bientôt sur Twitter, parce que je veux comprendre. Les mômes devant l’écran ignorent les dangers qui peuvent venir de salopards et harceleurs de leur même cour de récré derrière l’écran. J’étais content de durcir la chanson en hip hop et j’ai invité le rappeur La Fouine.

«Les Larmes de leurs pères» sur le printemps arabe est d’actualité…

Je l’ai écrite en une nuit, en mai 2011, après une discussion avec un ministre de la communication dont le père avait été un grand dissident tunisien. On ne pouvait pas s’attendre à ce qui se passe en Égypte. Ils ont le sentiment de s’être fait voler leur révolution et ils ont le courage de redescendre dans la rue contre une constitution islamiste.

Vous parler souvent de votre peur de vieillir et de la mort. C’est assez troublant alors que vous êtes l’ami sympa de la famille non ?

C’est vrai. Quand on décortique le quotidien et qu’on a des enfants, c’est obligé qu’on soit gagné par des peurs. Quand je suis seul, j’ai constamment 50% de mon cerveau occupé par mes enfants et je me demande dans quel monde je les ai amenés, même s’il n’est pas pire qu’avant. C’est ce que je traduis en chansons. Dans le précédent album, j’avais gonflé tout le monde avec des chansons extatiques… Car je suis aussi plutôt positif de nature et je renvoie cette image de bon copain qui peut faire marrer tout un resto, parce que c’est moi aussi.

Entretien : Caroline GESKENS

À écouter

Patrick Bruel, «Lequel de nous» (Sony Music)

À voir

Le chanteur sera à l’affiche du gala «Noël sous les étoiles», vendredi 21 décembre 2012 à 20.45 sur France 3.

Photo : Diane Sagnier

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