Fabuleux héritage pour un petit village, Le Chambon-sur-Lignon

Image extraite du documentaire diffusée ce lundi sur France 3 © France 3/Caméra Subjective

Pourquoi Erich Schwam a-t-il légué 3,5 millions d’euros à une petite commune française où personne ne le connaissait ? C’est une longue histoire.

«Il restera de toi ce que tu as donné au lieu de le garder dans des coffres rouillés…» C’est la première phrase d’un poème de Simone Veil. Dans les années 1990, il a été mis en musique pour accompagner les enterrements. Cette phrase, on l’a retrouvée punaisée dans la maison d’Erich Schwam.

Écrite à la main sur une feuille de cahier. Erich Schwam a légué toute sa fortune a une petite commune française de 2.500 habitants. Ce lundi, sur France 3, «La Ligne bleue» raconte l’extraordinaire histoire de ce vieux monsieur.

De Vienne à Shanghai

3.475.000 €. C’est la somme colossale dont a hérité l’an dernier le village du Chambon-sur-Lignon, en Haute-Loire. Quelques mois avant de mourir à 90 ans, Erich Schwam avait modifié son testament pour que toute sa fortune revienne à la commune. Qui était cet homme ? Personne ne se souvenait de lui au Chambon. Mais lui n’avait pas oublié…

Erich Schwam est né en octobre 1930, à Vienne, dans une famille juive autrichienne. Erich a 7 ans, en mars 1938, quand Hitler annexe l’Autriche au Reich. C’est l’Anschluss. L’antisémitisme déferle rapidement sur la capitale. Les Schwam décident de fuir. Ils sont aidés par le consul de Chine à Vienne. Sans en référer à Pékin, ce diplomate sauve des milliers de Juifs en leur délivrant des visas pour Shanghai. Les Schwam n’ont pas l’intention d’aller en Chine, mais ces papiers leur permettent de quitter l’Autriche.

De Rivesaltes à Auschwitz

Erich a 8 ans quand la famille arrive à Bruxelles, en mars 1939. Depuis l’Anschluss, comme tous les Autrichiens, les Schwam ont un passeport allemand. En mai 1940, après l’invasion allemande, ils sont donc considérés comme ressortissants d’un pays ennemi. Ils sont mis dans un train pour Rivesaltes, près de Perpignan. Officiellement, c’est un camp de regroupement familial. Dans les faits, derrière les barbelés, c’est un camp d’internement des Juifs étrangers. On y souffre de la faim et du froid.

La Croix-Rouge suisse est présente sur place pour apporter un peu d’aide aux réfugiés. L’une des jeunes infirmières, Friedel Bohny-Reiter, se lie d’amitié avec Malcie Schwam, la mère d’Erich. En août 1942, alors que le nom des Schwam est sur la liste du prochain convoi pour Auschwitz, Friedel parvient à le faire rayer. Elle sauve ainsi la famille d’une mort certaine.

Du Chambon au Chambon

Quelque temps après, l’infirmière propose aux Schwam de rejoindre Le Chambon-sur-Lignon, un village de Haute-Loire où son fiancé cache des Juifs. La famille arrive au Chambon en février 1943. Erich a 12 ans. Il est accueilli dans plusieurs fermes, par des gens simples et courageux. Mais surtout : il peut retourner à l’école. Le gamin est très studieux.

À la fin de la guerre, les Schwam décident de rester au Chambon, le temps que leur fils décroche le bac. C’est chose faite en 1949. Les parents repartent alors vers Vienne. Mais Erich refuse de les suivre. Il ne veut pas rentrer dans ce pays qui l’a chassé pour raisons raciales. Il a fait toute sa scolarité en français. Il veut rester en France !

Erich Schwam s’inscrit alors à la fac de pharmacie de Lyon. Puis il s’est marié, a obtenu la nationalité française, et a fait toute sa carrière dans l’industrie pharmaceutique. Plus personne n’a jamais entendu parler de lui au Chambon-sur-Lignon. Mais lui, n’a jamais oublié… Selon ses dernières volontés, sa fortune doit soutenir l’école du village et aider les jeunes du Chambon à faire des études supérieures. 

Cet article est paru dans le Télépro du 19/5/2022

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